mardi 22 mars 2016

Puis il mesura le mur du temple (Ez 41,5)

וימד קיר־הבית
wayyamad qîr-habbayit

Chers amis,
Après une journée “Patmos” lundi, ce mardi a été riche en (re)découvertes.
Notre programme habituel a été chamboulé : nous devions aller visiter le tunnel du Mur occidental, guidés par Dan Bahat, l’archéologue israélien qui a conduit les fouilles pendant une vingtaine d’années. Il n’était disponible que le matin, nous avons donc fait la visite à ce moment-là, le cours a eu lieu l’après-midi.
Rendez-vous était fixé à 9h00 à l’entrée du site, près de l’esplanade du Mur occidental. Et nous avons retrouvé la lumière du jour à 12h25 seulement. Mais c’était passionnant !
Le Mur occidental (photo prise en octobre pour Soukkot)
Pour vous expliquer, c’est simple… Aujourd’hui quand vous allez à la place du Mur des Lamentations vous pouvez voir une portion de mur assez imposante de 57 mètres de large. En réalité, ce n’est qu’une petite partie de tout le mur occidental du mont du Temple qui s’étend sur 488 mètres de long ! À droite, il y a les parties que nous avons visitées il y a quinze jours avec l’École : le centre Davidson et le Parc archéologique. À gauche, il y a tout ce que nous avons découvert aujourd’hui et qui est désormais souterrain : les bâtiments de l’époque mamelouke (écoles coraniques, hospices, tombeaux de sages…) ont été construits de manière à rehausser le niveau du sol pour ne pas avoir à monter au Mont du Temple, devenu entre-temps esplanades des Mosquées.
Dan Bahat parle assez bien le français qu’il a appris pour pouvoir lire dans le texte les livres des pères Vincent et Abel (de l’École Biblique évidemment !) qui faisaient référence sur Jérusalem. Toutefois, il arrive qu’un mot italien vienne interférer… Au début de la visite, il nous a montré une maquette qui permet de visualiser le rocher naturel, puis l’évolution du site au cours du temps : esplanade du Temple, puis des Mosquées, urbanisation mamelouke…

Nous commençons dans le passage secret : les musulmans qui connaissaient ce couloir perpendiculaire au Mur pensait que c’était le passage secret qu’empruntait le roi David pour se rendre au Temple de Jérusalem… [pour rappel, il n’y avait pas de temple à l’époque de David…]. En fait les murailles sont romaines et omeyyades : le “passage secret” n’est en fait que le support de l’aqueduc qui amenait l’eau sur l’esplanade afin que les musulmans puissent faire leurs ablutions…
Nous explorons pas mal tout ce complexe très peu lisible… On observe deux séries d’arcades l’une contre l’autre. Les arcades nord sont clairement hérodiennes, les autres, moins soignées, sont plus tardives. Il y a des bains rituels un peu partout… L’un d’entre eux est déchiré par une faille causée par un séisme. Dans le même axe, c’est le linteau hérodien d’une salle qui est cassé en deux. Un peu plus haut, une série de murs épais et rapprochés est interprétée comme le soutien de la chapelle Saint-Gilles, construite par les Croisés à cet endroit. Aucune trace de cette chapelle, sinon dans les textes et peut-être dans la salle de bar-mitsva : les piliers de la table sur laquelle les diplômes de bar-mitsva sont signés proviennent vraisemblablement de l’autel de la chapelle. Leur travail est clairement d’époque croisée.
Nous finissons par accéder à une immense salle cruciforme d’époque mamelouke : elle rehausse d’une quinzaine de mètres l’école coranique (madrasa) qui est construit sur elle. Et enfin, nous découvrons le mur occidental. Et pas à n’importe quel endroit !
Nous avons devant nous la plus grande pierre de toute la région. Je crois même que pour trouver une plus grande pierre dans l’Antiquité, il faut aller à Baalbek au Liban
Celle-ci mesure 13,6 mètres de long, 3,3 mètres de haut et 4,6 mètres de profondeur ! Son poids est estimé à 600 tonnes… Dan Bahat suppose que cette pierre et trois autres à peine plus petites servaient de soutien à la voûte d’une hypothétique salle de l’autre côté du mur. Vous pouvez aller la voir en suivant ce lien (c'est la visite que j'avais faite en 2007).
À partir de là, nous allons suivre le mur tout le long en allant vers le nord. On peut observer le soin du travail de la pierre. Nous restons globalement au même niveau mais en dessous de nous, le niveau du sol naturel monte puisque l’angle nord-ouest du Mont du Temple est occupé par une petite colline qui a été arasée pour donner toute son ampleur à l’esplanade.
Vers la fin, le mur se confond avec le rocher naturel : les ouvriers ont continué à travailler la pierre pour lui donner l’aspect d’un mur avec des pierres taillées. On a du mal à s’en rendre compte : il faut vraiment avoir le nez dessus…
Entre temps, on est passé devant la Porte de Warren : une ancienne porte d’accès à l’esplanade du Temple. Pendant la première période islamique, il y avait une synagogue à cet endroit. Mais les croisés ont condamné la porte.
Puis la rue hérodienne (avec le dallage d’époque) s’arrête brusquement et laisse place à un canal d’époque hasmonéenne (aux environs de 100 avant J.-C.) qui nous conduit à une citerne double. C’est la partie sud de la piscine du Strouthion, documentée par Flavius Josèphe (vous auriez pu vous en douter !). La partie nord se trouve sous le couvent de l’Ecce Homo (où je célèbre la messe chaque vendredi). À l’époque, pour défendre le nord du Temple, Hérode a construit un large fossé d’une soixantaine de mètres de large et il a creusé dans ce fossé un bassin pour recueillir de l’eau (une des nombreuses piscines qui se trouvent dans ce quartier). Plus tard à l’époque d’Hadrien, le Temple étant détruit, le fossé n’était plus utile, il a donc été comblé à l’exception de la piscine qui a été couverte de voûtes pour lui donner son état actuel. Nous terminons par un petit tunnel creusé directement dans la roche, à une époque très récente (fin xxe siècle) et nous débouchons devant le couvent franciscain de la Flagellation, point de départ du chemin de Croix.
Il était grand temps d’aller manger ! C’est là que nous avons appris les attentats de Bruxelles… Quelle misère.
L’après-midi, cours d’histoire et quelques précisions apportées par notre professeur sur la visite de la matinée. Puis il a présenté le voyage dans le Néguev qui aura lieu la semaine prochaine. Mais je n’y participerai pas ! Eh non, il faut bosser un peu !
Les jours saints sont là, et nous entrons dans la Passion, avec une drôle d’ambiance… puisque c’est Pourîm dans le pays jeudi et vendredi… Je vous expliquerai plus tard.
À bientôt,
Étienne+

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