mercredi 29 mai 2019

Le temps de mon départ est venu (2Th 4,6)

ὁ καιρὸς τῆς ἀναλύσεώς μου ἐφέστηκεν
ho kairos tès analuseôs mou ephestèken


Chers amis,
Dernière semaine à Jérusalem… Ce fut studieux.
Vendredi, j’ai fait « grève de bibliothèque » : la météo prévoyait 40° ! (il n’a fait que 38,6, soit 13° au-dessus des normales saisonnières !) et avec la prière du vendredi et l’affluence du Ramadan, la circulation est impossible entre la porte Neuve et l’École biblique. Grève de la bibliothèque ne signifiait pas chômage technique : j’avais prévu du travail, lecture et rédaction.
Samedi matin, j’étais à la bibliothèque.
Dimanche, je suis allé à Abu Gosh en tram et en bus. La messe était belle et marqué par un gros groupe d’Américains de l’Oregon. Du coup, pour l’apéritif, il n’y avait presque personne : nous étions cinq avec les frères. Ce qui nous a permis de nous asseoir et de deviser tranquillement tous ensemble, en sirotant un Martini, de l’arak, ou un jus de fruit. Je suis resté pour le déjeuner (des frites !) Après la vaisselle, frère Brice et frère Jean-Michel se sont mis en pékin pour aller voter au Consulat. Ça fait drôle lorsqu’on est habitué à les voir en blanc.
Denis m’a raccompagné en ville et j’en ai profité pour me faire déposer à proximité d’une maison d’édition où je voulais faire un achat. J’ai vite trouvé les bureaux et le gars était super sympa. Il m’a fait asseoir et m’a proposé de prendre un verre d’eau. Il m’a montré sa fille, Naomi, quatre mois et souriante. Puis je suis rentré au Collège. J’y retrouve le frère Fadi, visiteur du district Moyen Orient, arrivé pour quelques jours.
Lundi, journée bibliothèque, après la messe matinale à l’Ecce Homo. Le soir, je suis allé apéritiver-dînatoirement chez Laurence et Laurent-Pierre. Une manière de se saluer avant mon départ, de prendre des nouvelles de Laurence en convalescence de sa fracture. Leur fille Marie avait passé l’oral de latin le matin même. Soirée sympa et que je n’ai pas prolongée car j’étais fatigué et mes hôtes aussi. En rentrant, j’ai découvert un magasin de perruques. Splendide !
Mardi bibliothèque. J’ai libéré mon plan de travail en plusieurs jours. Je suis sorti vers 17h. Douche rapide puis je suis allé à l’Ecce Homo. La communauté du Chemin Neuf qui anime le lieu avec les Sœurs de Sion avait invité les quelques prêtres qui venaient célébrer la messe en semaine chez eux pour une messe d’action de grâces. J’avais prévu de ne pas présider (≠ je n’avais pas prévu de présider), c’était sans compter le complot des autres pour me confier cette charge… Moi, bonne poire, j’ai présidé.
Après la messe, repas sur la terrasse. Il était 19 heures, la lumière exceptionnelle et le vent frais après la touffeur du jour. Et le repas a été très joyeux et familial. Une vraie grâce.

En repartant, il y avait foule dans la rue. En ce temps de Ramadan, la rue est éclairée comme pour Noël chez nous et les gens vont faire l’iftah, le repas nocturne du Ramadan sur l’esplanade des Mosquées. Malgré l’heure avancée, il y avait du monde dans la rue et beaucoup d’enfants. Les soldats israéliens avaient mis des barrières partout et j’ai craint un moment de ne pas pouvoir remonter la Via Dolorosa. Ouf, ça passait. Je me voyais mal faire le grand détour par la porte de Damas…
De retour au Collège, je trouve une certaine agitation : un morceau du plafond venait de tomber dans la cuisine… Heureusement que ce n’est pas arrivé dans la journée quand Suzanne est là !
Mercredi matin, au petit déjeuner, j’ai salué les Frères qui partaient au Collège de Jaffa pour la visite par le Frère Fadi. Ils passent la soirée à Bethléem pour saluer le Frère Denis, australien, qui rentre au pays après quelque temps de service à l’Université de Bethléem.
Dans la matinée, j’ai assisté à la soutenance de thèse du frère Kevin Stephens, un dominicain américain (c’est lui qui avait été élu premier délégué des étudiants il y a trois ans avant de partir en vitesse, un mois plus tard, me laissant assumer la charge après lui !). Il a parlé de son travail sur Is 7-8 et Is 20. Il a un accent américain à couper au couteau et j’ai eu un peu de mal à le suivre (surtout que l’acoustique de l’Aula Magna est catastrophique). Mais c’était intéressant et les questions du jury pertinentes (beaucoup plus que pour la soutenance de Nicola) Il y a même eu quelques éclats de rire. Surtout quand Kevin a dit qu’à ce moment-là, il utilisait le genre rhétorique “épidictique” (celui du professeur avec ses élèves) et le P. Garuti, lui a fait remarquer qu’il était devant un jury, et qu’il y avait donc certainement un peu de genre “judiciaire” (comme un plaidoirie ou un réquisitoire).
Retour à la maison, j’ai mangé seul avec Pedro. J’ai salué Shadi et Suzanne.
Ménage, formalités, bouclage de la valise. Je prend le tramway vers 19h.

À bientôt,
Étienne+

jeudi 23 mai 2019

Les hommes furent chauffés d’une grande chaleur (Ap 16,9)


ἐκαυματίσθησαν οἱ ἄνθρωποι καῦμα μέγα
ekaumatisthèsan hoi anthôpoi kauma mega

Chers amis,

Comme le titre de ce billet l’indique, il faut chaud… Nous avions oublié que nous étions au mois de mai avec des températures très fraîches. Mais depuis mon anniversaire, il fait chaud. Et on annonce 38-39° demain !
Vendredi dernier, le P. Sami, mon voisin de bibliothèque m’avait invité pour la messe paroissiale en arabe qui est célébrée au Saint-Sépulcre. Il est franco-libanais, de rite maronite. À 7 heures, nous étions donc dans la tombe pour la messe. Il y avait une quinzaine de paroissiens (dont certains que je connais) plus deux ou trois Français clandestins invités par Sami mais dont la présence a énervé le franciscain de la sacristie…
Au cours de la messe, nous avons prié, à la demande d’une dominicaine de la Maison d’Abraham pour la paix au Burkina Faso. Le dimanche précédent, un prêtre et plusieurs fidèles ont été tués ; le lendemain, quatre personnes encore, au cours d’une procession mariale et le jour même de notre messe, un salésien espagnol a été poignardé. La sœur portait cette situation avec une douleur visible. Le “pays des hommes intègres” ne mériterait-il plus son nom ?
Au Saint-Sépulcre, à cette heure-là, il y avait beaucoup de femmes musulmanes qui visitaient… Elles devaient profiter d’un peu de temps avant la prière du vendredi sur l’esplanade des mosquées pour faire du tourisme. En sortant, il y avait même trois paires de chaussures à l’entrée ! Mais il n’est pas impossible que ces chaussures aient appartenu à des chrétiens coptes ou éthiopiens, qui se déchaussent avant de rentrer dans l’église.
Après la messe, Sami m'a invité à prendre le petit-déjeuner au foyer maronite. Nous avons félicité Sœur Jeanne qui a renouvelé ses vœux (à l'occasion de son anniversaire de profession perpétuelle). Il y avait quelques sœurs de la charité d'Ain Karem. Petit déjeuner comme on fait ici : œufs au plat, fromage, café, pain libanais...
Bonne journée de travail, malgré l’état de siège de la ville pour cause de prière du vendredi.

Le soir, j’étais invité chez Michelle et Denis. J’ai sympathisé avec Michelle il y a trois ans et demi, pendant le cours de topographie de l’École Biblique. Son mari est proviseur du Lycée Français de Jérusalem. Ils quittent la Terre Sainte en juin pour aller s’installer à Londres dans un Collège bilingue privé. Une nouvelle aventure !
Ils avaient invité Dorothée et Denis de Bethléem et d’autres personnes. Bref, soirée sympathique. Pendant l’apéro, on a vu – enfin, surtout entendu – passer en contrebas sur l’avenue du roi George (V, comme l’hôtel) une manifestation de Juifs orthodoxes qui protestaient contre l’Eurovision à Tel Aviv. Les répétitions du vendredi soir ont suscité leur colère et le grand rabbin ashkénaze d’Israël a décrété la prolongation du shabbat d’une heure pour compenser cette transgression. Ils hurlaient en marchant, suivis par la police. Y a des gens qui ont le chic pour se pourrir le vendredi soir.
Samedi matin en bibliothèque. L’après-midi, j’ai profité d’une relative fraîcheur pour aller me balader. Le temps était magnifique mais le vent d’ouest soufflait fort et faisait tomber la température.
Dimanche matin, j’avais rendez-vous avec Laurent-Pierre et Laurence pour me conduire à Abu Gosh. Laurence est rentrée de deux semaines en France pour se faire opérer de sa fracture à la cheville. Maintenant, elle doit rester immobilisée encore un mois.
Très belle messe à Abu Gosh, avec beaucoup de monde. J’ai eu un petit coup de mou pendant l’homélie de Frère Brice. Dommage, car j’aime bien son humour piquant et espiègle.
Non, ce n'est pas une carte postale ! C'était comme ça l'autre jour !
 L’apéro post-eucharistique a été très sympa : beaucoup de monde à saluer et avec qui parler, échanger des nouvelles… Là, je suis parti avec Denis et Dorothée vers Palmaḥîm, la plage la plus facilement accessible depuis Jérusalem. La plage est située dans un parc naturel coincé entre un kibboutz et une base militaire (c’est là que sont situés certains équipements du Dôme de Fer destiné à protéger Israël des roquettes gazaouies). Le dimanche, c’est sympa, il n'y a pas grand monde mais je n’ose même pas imaginer les foules du shabbat… Ça doit être un beau בָּלָגָן (pour une traduction soutenue, on peut dire “désordre”) ! Du coup la fréquentation est plutôt goy et catho...
Nous retrouvons Denis, Michelle et Lea (leur fille), Annemieke et son mari qui, moins pieux que nous, sont déjà là depuis un petit moment. Après le pique-nique, une baignade dans la Méditerranée. L’eau est un poil fraîche mais je ne gâche pas mon plaisir… Après une sieste à l’ombre (il y a des sortes de parasol fixes en palmier), je retourne me baigner. Super après-midi !
Retour à Jérusalem assez facile.
Lundi matin, messe à l’Ecce Homo. Journée à la bibliothèque (c’est d’un original). En sortant, je suis allé prendre l’apéritif chez Caroline, spécialiste de Philon d’Alexandrie. Nous avons bu un bon vin de Judée, “Petit Castel”, en le goûtant, j’ai pensé à un Bourgogne. En regardant sur Internet, j’ai vu que ce sont les vignes que j’ai traversées pendant ma balade du lundi de Pâques.
Les vignes du Domaine du Castel depuis les ruines du château croisé de Belmont
Mardi, normal… Mercredi matin, dernier cours avec le P. Dominique-Marie. C'était passionnant et il a parlé de choses nouvelles qu'il a découvertes après la soutenance de sa thèse. C'est donc top secret et il nous a demandé de ne pas prendre de photo des plans qu'ils a projetés ni d'en parler sur Internet... Je me cantonne donc à vous dire ça, sans plus. Il faudra attendre la publication ! Le reste de la journée fut normal avec la messe à midi à l’ÉBAF. Le soir, toutefois j'étais invité, dans le jardin de l’ÉBAF à un barbecue organisé par Loïc et Sophie avec leur groupe d’amis et les quelques prêtres qu’ils ont invités tout au long de l’année pour les séances de “catéchisme”. C’est pour ce groupe que j’ai fait un topo sur l’Apocalypse il y a trois semaines à Abu Dis. L’ambiance était super, on a bien discuté, refait le monde, parlé de nos projets…
Ce jeudi, travail à la bibliothèque. J’ai rencontré Anthony qui m’a encouragé et nous avons fait des plans pour la suite. Bon échange stimulant.
À la maison, je me calfeutre dans ma chambre avec un brin de clim… On respire.
À bientôt,
Étienne+


jeudi 16 mai 2019

(2Ch 22,2) בֶּן־אַרְבָּעִים וּשְׁתַּיִם שָׁנָה

ben-ɔarbācîm ûštayim šānāh

Chers amis,
Ça n’a pas manqué. À peine vous avais-je parlé de la douceur de ce début de mai que la chaleur de l’été nous est tombée dessus avec une violence qui nous fait comprendre qu’elle est bien installée.
Samedi, matinée bibliothèque et l’après-midi, une petit balade mais pas trop longue. En début de soirée, Laurent-Pierre m’a récupéré et nous sommes allés dîner chez Denis et Dorothée à Beth Jala, à côté de Bethléem : bière de Taybeh, grillades et salade de fruits. Et puis une compagnie agréable et drôle.
Dimanche matin, je suis allé célébrer la messe à la Maison d’Abraham : les scouts de France de Jérusalem avaient leur dernière sortie dominicale. J’ai donc célébré pour une douzaine de louveteaux (chemises oranges) et une dizaine de pionniers (chemises rouges). La fresque de la chapelle de la Maison d’Abraham m’a donné des distractions pendant l’oraison avant la messe : il y a des inscriptions en latin et en syriaque. Le lendemain, je les ai déchiffrées.
Après la messe, on a discuté un peu avec les jeunes et les responsables.
Déjeuner avec les Frères, ce qui est finalement rare. Le dimanche, Suzanne la cuisinière n’est pas là. Souvent c’est donc le Frère Rafael qui cuisine : une petite salade thon-olives, une omelette… Un peu de simplicité !
Lundi matin, messe à l’Ecce Homo. Journée de travail. Je dépiaute la quatrième béatitude.
Le soir, je suis monté sur le toit des Frères pour voir le “coup de canon” qui signale aux musulmans que le soleil est bien couché et qu’ils peuvent se mettre à manger. En fait, ce n’est pas un canon, mais une simple fusée de feu d’artifice. On voit donc une petite flamme qui monte vers le ciel et provoque un petit nuage de fumée, le bruit de l’explosion n’arrive qu’avec deux longues secondes de retard. Pour le spectacle, c’est tout ! Et je me suis aperçu cette semaine, qu'il y avait aussi un “coup de canon” le matin, vers 4 heures (je l’ai entendu, mais je n’ai pas vérifié l’heure !)
Mardi, j’ai quitté la bibliothèque un peu plus tôt qu’à l’habitude. À 17 h, nous devions partir pour Bethléem pour la messe de saint Jean-Baptiste de La Salle, à 18 h. Il fallait bien une heure pour faire les 10 petits kilomètres qui séparent les deux villes. Déjà pour faire les 100 premiers mètres, il a fallu 10 bonnes minutes : un faouda de bagnoles à la porte Neuve, entre ceux qui voulaient rentrer, ceux qui voulaient sortir et ceux qui étaient garés et ne voulaient pas bouger… Délices de l’Orient.
La messe était présidée par le curé de Taybeh, ancien du Collège de Jérusalem. Concélébraient, en plus de moi, le Père Peter Du Brul (sj) et un prêtre melkite dont la fille enseigne à l’École de Bethléem. Après la messe, il y avait évidemment un repas : mezzeh divers (crudités, hummus, moutabbal) et du riz et du poulet. En revanche, pas de bière ou de vin, seulement des jus de fruits, du coca et du lait d’amande (la boisson spéciale du Ramadan, paraît-il, qui permet de ne pas avoir – trop – soif après). En dessert, des katayef, pâtisserie spéciale ramadan, là aussi. Imaginez une sorte de chausson aux pommes sans pommes et sans pâte feuilletée. Vous voyez ? Non ? Tant pis ! C’est une petite crêpe roulées en chausson et fourrée avec des tas de bonnes choses (sucrées, crémeuses, mielleuses…). La version fromage ne m’a pas convaincu (imaginez une crêpe au Babybel® fondu…) mais celle avec les fruits secs (noix, cajou, amandes) est délicieuse.
Après le repas, bingo ! Les Palestiniens adorent ce jeu ! En fait, c'est exactement la même chose que notre loto. Les cartons sont organisés d'une manière strictement identique. En fait, on distribue des papiers sur lesquels sont inscrits six grilles. Les chiffres sont dits au fur et à mesure (en arabe, ça fait réviser !) et au début, il faut remplir une ligne (notre quine) puis deux et enfin un carton plein. Les lots sont un peu babioles et broutilles : une bouteille de lessive, un service à café (qui fait mal aux yeux), des verres... La seule différence avec Saint-Didier où le loto est une affaire sérieuse, qui exige silence, concentration et méticulosité... A Bethléem, vous vous doutez bien que c'était un peu le b... le faouda... (فوضى )
Au retour, Frère Daoud nous a mis dans le coffre de la voiture deux grands bacs en inox avec des restes de riz et de poulet du repas. Et nous voilà partis…
Arrivés au check-point, nous sortons nos passeports et la soldate a ouvert le coffre (en fait, une odeur de poulet flottait dans la voiture). Elle nous a demandé ce que c’était… Le Frère Rafael leur a dit en riant : We have been invited. Feel free to take some of it if you want. Elle nous a demandé si nous étions כמרים (= prêtres chrétiens) Les Frères étaient en soutane et en rabat. On n’a pas perdu de temps à leur faire un cours de droit canonique sur la vie consacrée, le sacerdoce ministériel, etc. On a dit oui. Et au revoir ! L’une des filles parlait espagnol.
Mercredi matin, je ne suis pas allé à la bibliothèque. En fait, je devais aller au Consulat pour faire ma procuration pour les élections. J’avais rempli puis imprimé le papier, prévu mon passeport et même de la lecture pour attendre. Je rentre dans les bureaux et il y avait une trentaine de petits vieux qui venaient faire leur certificat de vie (ça leur permet de toucher leur retraite !). J’ai cru que j’allais y passer la matinée. Finalement, j’étais assis depuis 10 secondes que la dame du bureau n° 2 m’a fait rentrer. Merci Seigneur. En cinq minutes, c’était bouclé.
De retour au Collège, j’ai fait un détour par l’hôpital français, juste en face de chez moi, de l’autre côté du boulevard. C’est là que le P. Charles, abbé d’Abu Gosh est hospitalisé. J’ai seulement eu à me présenter à l’accueil que la jeune femme m’a indiqué le numéro de la chambre et l’étage ! Arrivé au second, même pas besoin de chercher mon chemin : « Vous cherchez la chambre n° tant ? C’est au bout du couloir à gauche ». En fait, je voulais regarder d’abord l’armorial de la première et de la deuxième croisades qui orne le mur du couloir. Il date des débuts de l’hôpital (fondé en 1896, construit sur le site de l’hôpital de l’Ordre de Saint-Lazare de l’époque des Croisés).
Photo : https://www.lpj.org/les-fresques-historiques-de-lhopital-saint-louis-en-cours-de-restauration/?lang=fr
Regardez le détail qui me touche...
Finalement, je trouve le P. Charles sur la terrasse ouest assis sur une chaise à l’ombre de l’auvent (normalement, je vois cette terrasse depuis ma chambre). Nous avons passé un petit moment à deviser. Je l’ai trouvé amaigri et diminué mais alerte pour la discussion. Je ne me suis pas attardé mais depuis, je regarde s’il est là à prendre le chaud sur la terrasse.
L’après-midi, j’ai travaillé à la maison. Le soir, la messe était à nouveau celle de la fête saint Jean-Baptiste de La Salle. Normalement, ce saint est fêté le 7 avril, jour anniversaire de sa mort en 1719, mais les Frères ont demandé un indult à Rome pour célébrer la solennité de leur fondateur le 15 mai, anniversaire du jour où Pie XII l’a proclamé patron de la jeunesse et des éducateurs, puisque le 7 avril tombe pendant le Carême et même parfois pendant la semaine sainte.
Jeudi enfin, journée calme à la bibliothèque. Les étudiants sont en Jordanie toute la semaine et ont laissé un peu de vide…
Demain, vendredi, je crains les foules de la semaine dernière…
À bientôt,
Étienne+

vendredi 10 mai 2019

Rumeur de peuples nombreux… (Is 17,12)

הֲמוֹן עַמִּים רַבִּים
hămôn cammîn rabbîm

Chers amis,
Lundi traditionnel avec la messe à l’Ecce Homo. Journée calme autour de la quatrième béatitude, celle que vous entendez (mal traduite) à chaque fois que vous allez à la messe. Le soir en arrivant au Collège, j’ai eu la joie de retrouver le Frère Albert, venu d’Amman pour des soins dentaires chez le poétique docteur Ninos, qui habite à deux pas du Collège. Il y a deux ans j’ai fait sa connaissance lors de ma leçon doctorale.
Mardi soir, je suis allé dîner chez Jean et Agnès, un couple de l’Emmanuel, chez qui j’étais allé le vendredi précédent pour l’adoration. Repas sympa et bonne discussion autour d’un délicieux chakchouka, plat maghrébin inculturé en Israël par les Juifs séfarades. C’est une sorte de ratatouille pas trop purée avec des œufs. Avec Jean et Agnès, on a pas mal échangé sur la situation politico religieuse dans la région. Vaste programme.
Mercredi matin, j’ai eu le cours de topographie du P. Dominique-Marie. Il a évoqué la question du portique royal du Temple de Salomon (le long bâtiment couvert de tuiles au sud de l’esplanade du Temple : la maquette ne correspond pas à ce que le professeur a dit mais a au moins le mérite de vous montrer où cela se trouve). En fait, j’avais déjà lu l’article que le Père a fait paraître sur le sujet dans la revue biblique de 2018.
Le temple de Jérusalem (maquette du Musée d'Israël)

Jeudi et vendredi, travail à la bibliothèque.
En ce moment, il y a beaucoup de bruit :
En Israël, dans les semaines qui suivent la Pâque, il y a beaucoup de jours commémoratifs, liés au calendrier hébraïque. Tout d’abord, Yôm haZikaron laShoah oulaGvoura, “Jour du souvenir de la Shoah et de la bravoure”, qui se manifeste par toute sorte de cérémonies officielles mais aussi par la sonnerie d’une sirène à 10 h ce jour-là. Les gens s’arrêtent de marcher, sortent de leurs voitures, s’arrêtent de travailler et font une minute de silence. En 2016, j’étais dans la rue à ce moment-là, c’est impressionnant. Mardi soir, à 20 h, en allant chez Jean et Agnès, une autre sonnerie pour Yôm haZikaron lèḤalalei Maʿarakhot Israël oulèNifgaei Peoulot haɔEiva, “Jour du souvenir des victimes de guerre israéliennes et des victimes du terrorisme”. Il y a une sonnerie à 20 h le soir et une autre le jour même à 11 h (nous l’avons entendu pendant le cours du P. Dominique-Marie).
Mercredi soir, on entrait dans Yôm hacAtzmaout, “Jour de l’Indépendance”. C’est en tout cas le sens de l’expression même si dans ce cas présent, elle est discutable. Ce serait plutôt, l’anniversaire de la fondation de l’État d’Israël. C’est la fête nationale. Cela occasionne donc du bruit, de la musique dans la rue et pas moins de trois feux d’artifice… Un à 21 h 30, un autre à 22 30 et le dernier à minuit. L’autre jour, je voyais les avions qui faisaient des figures acrobatiques, peut-être en préparation d’une parade militaire. Et le vendredi soir, on entend la sirène qui annonce qu’une heure plus tard, le soleil va se coucher et qu’on entrera dans le shabbat. Pendant l’hiver, c’est plutôt vers 15 h 30 donc je ne l’entend pas, enfoui que je suis dans la bibliothèque.
En parallèle, les musulmans font eux aussi du bruit. Depuis lundi, vous n’ignorez pas qu’ils sont entrés dans le Ramadan, mois lunaire pendant lequel ils s’abstiennent de manger, boire, fumer, avaler la salive pendant la durée du jour (du lever au coucher du soleil). Le matin, un tambour réveille les gens pour leur dire : « Si vous voulez manger, c’est maintenant, après, il sera trop tard ; ne soyez pas paresseux comme les juifs et les chrétiens ! » (la citation sur les juifs et les chrétiens m’a été rapportée par le Frère Albert). Le soir, un coup de canon (en réalité un énorme pétard) résonne près de la Porte de Damas pour avertir les gens que le jeûne est rompu. Et la fête commence… Cela a donné notre mot ramdam ! En ce moment, nous l’entendons au moment de commencer la messe.
Ce vendredi, premier du ramadan, les musulmans ont été nombreux à se rendre sur l’esplanade des Mosquées, pour la prière du vendredi à midi. J’ai entendu le chiffre de 180 000 personnes ! Déjà lorsque je suis allé à l’École ce matin, à 8 h, il y avait un monde fou qui descendait la rue de Naplouse pour s’engouffrer dans la Porte de Damas. En face, de l’École, la gare routière qui dessert Ramallah, Naplouse et autre lieu du nord de la Cisjordanie était bloquée par des barrières et il y avait de nombreux soldats israéliens. Les trottoirs étaient eux aussi garnis de barrières. Mais ça passait. À midi, quand je suis sorti pour aller déjeuner, il y avait encore beaucoup de monde qui descendait. C’est au retour que j’ai eu du mal à retourner à l’École. Au croisement de la rue des Prophètes et de la rue Antara Ben Shadad, deux flics m’ont empêché de passer (c’est toujours à cet endroit que les em…. arrivent). J’ai essayé de parlementer, de dire que j’allais étudier, rien à faire. Je devais faire le tour du pâté de maison et arriver par le carrefour des stations-service. Mais là aussi, ça bloquait. Un flic m’empêchait de descendre la rue de Naplouse que tous les musulmans essayaient de remonter pour rejoindre leurs bus… Je n’étais qu’à 100 m de mon but, le portail de l’École. J’ai élevé la voix et finalement, ils m’ont laissé passer. Difficile de faire plus borné (et je suis poli).
Lorsque je suis sorti à 17 h 35, il y avait encore des gens parqués dans la rue de Naplouse à attendre qu’on les laisse passer au compte-gouttes. Les deux flics continuaient à empêcher les gens de passer et je suis arrivé dans leur dos. J'ai eu beaucoup de joie à leur faire un joli sourire et à leur souhaiter Shabbat Shalom ! Vous auriez dû voir leur tête !
Sinon, lundi, il a fait très chaud (34°!) et depuis mardi, le vent a tourné, il souffle et il fait froid (17° ou 18° au maximum dans la journée, au lieu de 25° en normale saisonnière). Ça doit être la version locale des "saints de glace". J'ai remis ma petite laine pour aller à l’École ! Et ça n'est pas pour me déplaire...
À bientôt,
Étienne+


dimanche 5 mai 2019

Suivant l’habitude de Paul… (Ac 17,12)

κατὰ δὲ τὸ εἰωθὸς τῷ Παύλῳ
kata de to eiôthos tôi Paulôi

Chers amis,
Que dire ? Ma semaine a été calme, même si j’ai fait quelques rencontres.
Lundi, messe matinale à l’Ecce Homo, depuis le lundi saint, nous avons repris les célébrations dans la Basilique et non plus dans la petite chapelle de l’étage.
Mardi matin, j’ai célébré la messe à l’autel du Calvaire. C’était une demande de Christophe, que j’ai connu il y a trois ans ici à Jérusalem. Il a perdu son père il y a quelques mois et à l’occasion de ce qui aurait été son anniversaire, il désirait qu’une messe fût célébrée à l’autel du Calvaire à son intention. Je lui ai proposé de me charger de cette mission. J’avais fait signe à quelques amis, dont ceux de l’Ecce Homo ou la famille de Laurent-Pierre.
Mercredi, journée calme. J’ai eu un courriel d’Anthony, mon directeur. Il m’a adressé ses félicitations pour le chapitre que je lui avais adressé à la fin de mars… Je suis content car c’est un chapitre important de mon travail et si l’étude de ce verset est bonne, cela oriente le reste de mon projet.
Jeudi, messe à midi à l’EBAF car le soir, j’avais rendez-vous avec Loïc et Sophie, le jeune couple chez qui je suis allé dîner la semaine dernière. J’ai fait leur rencontre en janvier dernier lors de mon premier passage à Abu Gosh, et nous avions parlé de mon travail sur l’Apocalypse. Avec quelques amis, volontaires eux aussi dans le pays, ils ont organisé un petit groupe de réflexion et de formation, autour de la Bible. Ils demandent à divers intervenants de venir leur parler de leur spécialité. Nous nous sommes retrouvés à Abu Dis, au home Notre-Dame des Douleurs, une sorte d’EHPAD tenu par les sœurs du même nom, fondées par Marie Saint-Frai. Deux jeunes foyers, deux volontaires et un stagiaire du consulat général. Avant toute chose, un petit apéro (à la Taybeh !) puis j’ai fait mon topo qui, je l’espère, a permis de déminer l’Apocalypse. Puis partage d’un repas léger (une super tarte à la tomate !).
Finalement, je suis rentré à la maison assez tard, mais la rencontre avait été super sympa.
Vendredi, calme, et le soir après la messe, je suis allé chez Agnès et Jean, un couple de l’Emmanuel pour l’adoration. Dans leur petite maison, la citerne au sous-sol est aménagée en oratoire avec la présence réelle. Nous étions une dizaine.
Une jolie porte dans la Vieille Ville
Samedi, matinée à l’École. L’après-midi après une bonne sieste, je suis allé me balader. Il faisait très beau mais le vent soufflait et donnait une relative fraîcheur : Musée d’Israël, rue heHaluts, Beth haKerem, vallée des Gazelles, Giv’at Oranim, German Colony et retour : 13 km en 2 h 10, bonne moyenne.
Le soir, je me suis couché bien tôt, car le soleil de l’après-midi était aussi chargé de khamsin, et j’avais un mal de crâne…
Le matin, c’est l’hymne palestinien chanté par les enfants de l’école musulmane sous mes fenêtres qui m’a réveillé : Biladi, biladi ! (ma patrie ! ma patrie !). Là, je me suis dit qu’il n’était pas très tôt…
Petit déjeuner avec les Frères, à l’issue duquel j’ai salué Frère José, qui repartait l’après-midi pour l’Espagne. Il tient le bon bout pour sa thèse sur les textes prophétiques de Mari (Mari, un site archéologique sur l’Euphrate à la frontière de la Syrie et de l’Irak).
J’ai pris le bus pour aller à la messe à Abu Gosh. Belle messe en petit comité : à part les 15 sœurs et les sept frères, il n’y avait que sept participants “extérieurs”. Le P. Abbé est rentré en soins palliatifs depuis une dizaine de jours, son état est un peu irrégulier. Je tâcherai d’aller le visiter, je n’ai qu’à traverser la rue.
Après la messe et l’apéro, j’ai déjeuné avec les frères : saucisson, poulet-frites et clafoutis aux cerises.
Pour rentrer, j’ai bénéficié de la voiture de Dorothée qui avait déjeuné chez les sœurs. Avant de partir, nous avons bien ri. Un mariage devait avoir lieu dans l’église en fin d’après-midi et la déco était en cours d’installation : je pense que Louis XIV a dû être jaloux: au temps de sa splendeur, Versailles devait ressembler à un jardin du curé à côté de l’opulence déployée aujourd'hui dans l’allée. Allée qui n’en avait pas besoin, les fleurs du jardin, dont les sœurs prennent grand soin, étant un délice pour les yeux.
Une bonne sieste, un petit tour en ville (que de monde !) oraison à Saint-Jacques et retour.
À bientôt,
Étienne+