mercredi 30 septembre 2015

Quitte ton pays... (Gn 12,1)

Lekh lekha me'artsèkha
לך־לך מארצך
Le grand départ, c’est aujourd’hui.
Après la belle journée de dimanche, entre brame du cerf dans le Ventoux à l’aube, messe solennelle au sanctuaire de Saint-Gens, au-revoir à la paroisse et celle de lundi partagée entre les ultimes préparatifs et les derniers examens des étudiants du Studium, il est temps de partir. Déjà lundi, en prenant l’apéro au Café de Paris, avec quelques paroissiens mon nez avait été attiré par les senteurs d’épices de l’étal du marchand (nous étions lundi matin, jour de marché à Saint-Didier).
Lundi soir, j’ai dîné à Notre-Dame de Vie pour saluer les uns et les autres et surtout la maîtresse des lieux. En soirée, à la maison paroissiale, j’ai partagé un excellent Glenfiddich avec Paul et Daniel pour se dire au-revoir et même projeter une rencontre à Jérusalem... Derniers rangements en fin de soirée: j’ai mis toutes mes affaires dans un placard de la maison paroissiale. (Paul et Daniel remarqueront un détail dans la garde-robe)
Mardi matin, messe aux aurores (et même avant) à la chapelle de la Vierge de l’église de Saint-Didier, près du tombeau de l’abbé Alexandre Martin pour leur confier toute cette année. Le petit déjeuner a suivi avec Paul et Daniel qui partaient ensuite prier au Studium.
À 7h15 pétantes, j’étais dehors et Odile W. est arrivée pour me mener à l’Isle-sur-la-Sorgue. Elle y enseigne l’allemand et son lycée est à deux pas de la gare. Billet de train, au revoir et embarquement vers la gare VAMP (non, ce n’est pas une histoire de filles – danger de mort –, ça veut dire Vitrolles-Aéroport Marseille-Provence.) Navette vers le terminal 1, enregistrement des bagages. J’avais droit à 20 kg et ma valise (généreusement mise à dispo par le P. Jean-François) pesait 19,9 kg. Ouf, j’ai eu chaud car le bagage à main est deux fois trop lourd.
À l’heure dite, nous embarquons dans le Boeing 737 de Turkish Airlines mais notre vol décolle avec 50 minutes de retard. La correspondance va être chaude à Istanbul, avec les formalités israéliennes. J’ai tout de même mon billet pour le vol Istanbul-Tel Aviv.
Nous sommes passés au-dessus de l’Italie et nous avons même vu Venise et sa lagune. J’étais tellement ébahi que je l’ai dit à ma voisine. Nous avions un choix de films, j’ai mis le dernier Avengers... Je n’ai rien compris, ça castagne à tout va mais le scénario est trop compliqué pour moi : qui sont les bons (pas trop difficiles, ce sont les acteurs connus), que veulent les méchants…
Le repas est frugal mais très bon, il y avait même du vin d’Anatolie. Le café n’était pas turc, ouf !
L’avion a donc eu 1h de retard à Istanbul, le temps de débarquer, de trouver son chemin, et mon avion vers Tel Aviv était déjà en l’air... La séquence suivante fut digne des grandes heures de l’administration. « Allez au guichet 215 » Après un quart d’heure d’attente au dit guichet, en compagnie d’une foule aussi perdue que moi, on me demande d’aller au Transfer Desk (suivre le couloir à gauche, prendre l’ascenseur pour descendre au premier (j’en venais...) et là, on me renvoie vers le guichet 215. Youpi !
Finalement, je trouve un guichet Turkish Airlines et j’ai pu changer mon billet. Mon nouvel avion part trois heures plus tard, ce qui laisse du temps pour prendre connaissance, si l’on peut dire, des services de l’aéroport Atatürk. Parfums, cigares, loukoums... Ce n’est pas tout à fait l’échelle du Spar de Saint-Didier. Juste un peu plus grand. En revanche, impossible de trouver un WiFi ouvert...
J’ai aussi appris quelques mots de turc. Poussette, ça se dit puset, par exemple. Change, c’est döviz...

Mercredi 30 septembre, 00h00...
Enfin arrivé à Tel Aviv. Je poireaute pour le contrôle des passeports... Jamais vu autant de monde. Les employés font du zèle, ça n’avance pas. « La patience obtient tout » dit-on, c’est le moment de vérifier l’adage thérésien.
En revanche, si vous ne voulez pas subir d’interrogatoire avant de décoller, passez par la Turquie. Le seul truc qui rappelait vaguement les consignes de sécurité, c’est un pauvre tampon apposé sur ma carte d’embarquement "checked Security". Cela laisse rêveur.
00h45, ça y est! J’y suis, on a tellement attendu le contrôle des passeports que les bagages ne tournaient même plus sur leur tapis roulant.
Il est un peu tard pour prendre la navette Nesher vers Jérusalem, cela me ferait arriver en plein milieu de la nuit. Je trompe l’ennui dans le grand hall de l’aéroport. Je dors un peu, en profite pour vider un peu mon sac de cabine dans ma grande valise.
Sur les quatre heures du matin, je sors du hall et trouve sans difficulté les navettes Nesher. C’est un taxi collectif pour une dizaine de personnes. Quand le taxi est plein, il part. Sur la route, je pique du nez. La patience a été de mise encore une fois, pour amener les uns et les autres dans tel ou tel quartier de la ville. La navette m’a déposé à la Porte Neuve, que je franchis aussitôt pour renter dans la Vieille Ville. Dans la rue, il fait encore sombre ; une seule boutique est ouverte : je regarde à l’intérieur, personne mais un sourire de jeune femme… C’est Thérèse qui m’accueille ; le marchand a mis dans son échoppe un poster de la visite des reliques en Terre Sainte, en 2011.

Devant le collège des Frères, le portail s’ouvre devant moi pour laisser entrer la camionnette de livraison du pain. Je me présente au portier, un vieil arabe qui m’embrasse comme du bon pain, tout heureux de me voir débarquer. Il me fait monter chez les Frères. La cour de récréation du Collège ne m’évoque aucun souvenir…
Même l’étage occupé par la communauté des Frères a changé. Des travaux ont eu lieu et toute la partie cuisine salle-à-manger a été réaménagée pour leur école hôtelière. Ma chambre est bien connue, c’est celle que j’occupais en juin 2007. 3m x 4m, deux fenêtres, un grand placard, un bureau et un lit, un petit cabinet de toilette avec WC, lavabo et douche italienne. Les deux fenêtres donnent l’une sur l’Hôpital Saint-Louis (dit aussi Hôpital français ou French Hospital) et la ville juive. Le tramway passe sous les fenêtres et se reconnaît à son tintement ; ils ont voulu faire une belle voie végétalisée comme par chez nous, mais ici, l’effet est raté. Le green est plutôt yellow. L’autre sur la Vieille Ville et le Mont des Oliviers (à cette heure-là, la lumière de l’aube approche). En ouvrant la fenêtre, une odeur d’encens et de myrrhe me parvient. À nulle autre pareille, ça y est, je suis à Jérusalem.
Vue de ma chambre, juin 2007...

Lorsque vous regardez le bandeau de titre du blog, vous voyez la deuxième fenêtre juste au-dessus du « e » de Étienne.
Après un verre de jus de pamplemousse, je range mes affaires, prends une rapide douche et m’effondre sur le lit. Je dors presque trois heures. Sur les 10 h, je quitte le Collège pour rejoindre l’École et effectuer les démarches administratives d’inscription. C’est vite fait et je rentre au Collège en prenant le chemin des écoliers : Porte de Damas, le souk, le Saint-Sépulcre (quelle foule !) et retour à la maison par les petites rues. À un moment, un vieux commerçant assis devant sa boutique me dit : « Bonjour, comment ça va ? » dans un français parfait mais un peu lent. Je suis ébahi de me voir démasqué. Pour rentrer, me voilà avec un trousseau de clés que j’ai associé au porte-clés ecclésiastique tendance.
Il est bientôt 13h, c’est l’heure du repas avec les Frères. À table !