dimanche 8 novembre 2015

L’homme dira à Sion « mère » car en elle, l’homme advint

Μήτηρ Σιων ἐρεῖ ἄνθρωπος καὶ ἄνθρωπος ἐγενήθη ἐν αὐτῇ
Mètèr Siôn erei anthrôpos kai anthrôpos egenèthè en autè. (Ψ 86,5)

Chers amis,
Bonjour à vous et saint dimanche !
Jeudi après-midi studieuse autour de la 1ère des sept béatitudes de l’Apocalypse.
Vendredi, j’ai fait la grasse matinée, 6h15… C’est le jour où les Frères n’ont pas cours dans la semaine et on peut se lever plus tard… Matinée de cours sur saint Marc et les deux dernières heures du P. Gilbert sur les livres sapientiaux. Le cours était passionnant et riche en ouvertures. Il faut dire que le P. Gilbert, sj, est un puits de science, avec des années d’enseignement, de recherches, d’échanges dont on peut bénéficier maintenant…
Le soir, je suis allé sous la pluie à la maison d’Abraham pour célébrer la messe et partager le repas avec les sœurs et les bénévoles. En fait, depuis quinze jours, le temps est vraiment pluvieux. Ça ne dure pas forcément longtemps mais la menace est toujours là. L’autre jour, à la pluie, s’est ajouté le sable qui s’infiltre partout ! Après, il faut passer le balai ou le torchon qui devient couleur ocre.
Ce soir-là, j’ai raté la conférence sur le patrimoine syrien en péril. Vous voyez les photos aériennes du temple de Bel à Palmyre, au cours du temps…

Samedi matin, à la bibliothèque. L’après-midi, je suis allé me balader dans la Vieille Ville. J’étais armé du guide du P. Murphy O’Connor et je suis parti à la découverte des bâtiments mamelouks du quartier musulman.
« Qui sont les mamelouks ? » me direz-vous ?

Au départ, il s’agit d’esclaves chrétiens, originaires du Caucase et qui étaient convertis à l’Islam et entraînés comme soldats, cavaliers d’élite, pour les Ayyoubides, la dynastie kurde dont Saladin est le membre emblématique. En 1250, les généraux mamelouks renversent les Ayyoubides et deviennent les maîtres d’un empire qui va de l’Égypte à la Syrie. À cette époque, l’importance économique et politique de Jérusalem diminue. La ville n’a plus de murailles : les Ayyoubides les ont détruites pour éviter que les Croisés n’y trouvent un refuge efficace.
Transformée en centre religieux, Jérusalem subit un intense processus d’islamisation et devint le foyer de pèlerinages musulmans. La domination mamelouke se caractérise par son architecture typique et musulmane : de nombreux édifices religieux sont construits par les administrateurs mamelouks, les dirigeants musulmans locaux et de riches pèlerins qui s’y installèrent. Ces édifices, originairement des madrasas d’études islamiques, des ribats conçus comme des monastères mais principalement utilisés comme auberges pour les pèlerins, ainsi que d’élégantes constructions funéraires furent construits le long des rues à l’ouest et au nord du mont du Temple.

On construit aussi des mosquées dans la Ville ainsi que des hammams, des fontaines dans les rues. Les mamelouks dominent la région jusqu’en 1517, époque à laquelle les Ottomans prennent le pouvoir qu’ils conserveront jusqu’à la fin de la première guerre mondiale.
Suq el-Qattanin / Marché des Cotonniers

Les bâtiments mamelouks sont très beaux mais pas du tout entretenus et souvent ils se trouvent dans des rues, hors des sentiers battus. Pour me rendre dans l’une d’entre elles, on passe par un étroit tunnel et on se dit que c’est un coupe-gorge… et en sortant, on trouve quelques bijoux architecturaux.
Il faut aussi une bonne dose d’audace pour pouvoir admirer ces chefs d’œuvre… En effet, un certain nombre sont situés dans des rues qui donnent accès au Mont du Temple/Esplanade des Mosquées. Ces accès sont réservés aux musulmans et gardés par des soldats israéliens. J’ai appliqué la technique du naïf pour demander la permission. Ça a marché à trois endroits mais dans le dernier… un chef est passé et m’a viré avec la coutumière amabilité locale. Je râlais intérieurement parce que le monument que je n’avais pas vu était beau…
La plupart du temps, on ne peut pas entrer dans les édifices mais la seule façade vaut le détour. L’entrée est encastrée dans la façade et est flanquée de banquettes de pierre. La façade est souvent encadrée par une moulure.
Mukarnas

Mukarnas : stalactites en pierre en trois dimensions, graduées dans la semi-coupole surmontant l’entrée. On peut avoir jusqu’à 8 niveaux d’ornements.
Ablak











Ablak : maçonnerie à rayures. Des couches de beau calcaire local couleur crème alternent avec des couches de pierres de différentes couleurs, ordinairement rouges, mais aussi noires ou jaunes. Sur cette photo, vous devinez le joint un peu spécial fait de plaques de plomb pour souligner la séparation entre les deux niveaux.
Klebo










Klebo : pierres de différentes couleurs mêlées, sculptées dans divers profils et imbriquées les unes dans les autres comme dans un puzzle.
Des inscriptions, en élégante écriture arabe, comprennent notamment des citations du Coran, mais aussi le nom du constructeur et la date de construction. 




Parfois, un blason circulaire indique la fonction du constructeur-propriétaire : à gauche, officier de la garde-robe du sultan ; à droite, grand échanson ; au centre, on ne sait pas trop…

Ce dimanche, matinée calme, messe à l’École biblique. L’après-midi, je suis allé visiter un musée (fermé la semaine dernière) sur Jérusalem à l’époque du premier temple, c’est-à-dire le temple de Salomon. Il y a une maquette, un petit film (moins orienté politiquement que celui de la semaine dernière et avec des parties en dessin animé sympa). Sinon, le reste est bien, sans plus…
Quand j’ai visité, il y avait un groupe de soldats qui visitait, ça encombrait un peu pour visiter sereinement… Après, je suis allé dans le quartier juif pour retrouver les vestiges de l’église de la Néa, une église byzantine du vie siècle. On part d’une jolie place avec un bâtiment construit par les Rothschild au xixe siècle, pour servir d’hospice. Ensuite, il faut passer dans des escaliers étroits, des cours sombres pour finalement arriver devant une porte en fer close… Heureusement j’avais déjà pris en photo les vestiges. Les horaires d’ouverture à Jérusalem me remplissent de perplexité… Sur le guide, il y a des horaires, mais ils ne correspondent pas à ce qu’on trouve sur Internet et une fois sur place, les horaires affichés sont encore différents et en plus, ce jour-là, il y a une occasion (un prétexte) qui explique que le lieu ne soit pas accessible… Enfin…
Sinon, en fin d’après-midi, il y a eu une conférence à l’École biblique du P. Jean-Baptiste Humbert, l’archéologue de la maison, sur le thème Archéologie et Bible. Mais comme il y avait eu un malentendu à la fois sur le titre et l’auditoire, la conférence manquait un peu de fil directeur… Mais le texte devrait être mis sur le site Internet de l’École et je ne manquerais pas de vous orienter dessus au moment où il sera mis en ligne.
La semaine qui s’ouvre s’annonce chargée avec un séminaire d’études sur L’histoire de la Samarie à travers les sources bibliques et archéologiques (1550-660 av. J.-C.). En gros, on a quatre heures de cours le matin et quatre heures l’après-midi… Le programme a l’air passionnant. Alliant recherche et enseignement, le séminaire prépare le voyage en Galilée-Samarie qui aura lieu la semaine suivante. Il n’y aura peut-être pas grand-chose à raconter et à illustrer dans la semaine qui vient… mais ensuite, ça va être le feu d’artifice…
À bientôt,
Étienne+

2 commentaires:

Unknown a dit…

Merci Etienne pour ces récits passionnants.
Il va falloir prévoir une super conférence à la MIL au retour.
A bientôt
Amitiés
Ghislaine

Unknown a dit…

Merci Etienne pour toutes ces aventures :-) Pour approfondir le sujet des Mamelouks, on peut ajouter que le mot mamelouk est dérivé de la racine arabe ملك qui renvoie à la possession. En gros, éthymologiquement, quand on parle des malelouks, on parle de ceux qui sont possédés par quelqu'un. Un comble pour des gens qui ont pas mal gouverné le coin !