mercredi 11 novembre 2015

Je vais faire de Samarie une ruine dans la campagne (Mi 1,6)

wesamtî shomrôn le‘î hassadeh
ושמתי שמרון לעי השדה

Chers amis,
Comme annoncé, je passe mes journées depuis lundi dans la salle de cours de l’ÉBAF… 

En fait, c’est un peu plus large que ce qui avait été annoncé ; l’intitulé actuel est De Canaan à la Samarie-Galilée : une histoire du Levant à travers les sources archéologiques, historiques et bibliques. Le titre de ce message est lié au fait que nous évoquons beaucoup les ruines et les vestiges du passé dans cette région de Samarie-Galilée que nous parcourrons la semaine prochaine. La prophétie de Michée est toujours d’actualité… La région est couverte de vieux cailloux…
Nous avons commencé lundi avec une conférence sur l’utilisation de l’Ancien Testament comme source pour établir l’histoire de la Samarie… C’était très historico-critique avec des tas de versets d’Amos et d’Osée… mais c’était intéressant. En même temps, le professeur nous balançait à toute vitesse sans prendre le temps de les écrire des noms aussi évident que Kuntillet Ajdur, Assurbanipal, Qarqar, Tell el-Farah (sans préciser s’il s’agissait de celui du nord ou du sud ! mais comment voulez-vous qu’on s’y retrouve !).
Ensuite, on a évoqué le récit biblique pour montrer comment il raconte l’histoire d’une manière différente de la nôtre. Le point de vue était très narratif (comment on raconte, ce que l’on dit et ne dit pas, comment les gens parlent entre eux, comment on évoque l’intervention de Dieu dans l’histoire). La prof a pris comme exemple, le récit du schisme provoqué par Jéroboam à la mort de Salomon.
Les questions d’interprétation archéologique et chronologique ont été évoquées par deux étudiantes avec la difficulté d’un accord des archéologues pour dater un lieu.
L’après-midi, on a beaucoup parlé de la géologie du pays et de son corollaire pratique : l’eau si nécessaire pour pouvoir s’établir. Cela a amené l’intervention de notre archéologue maison sur les techniques employées pour assurer l’approvisionnement en eau : barrages, puits, citernes, aqueducs. On s’établissait souvent près de l’eau mais à une certaine distance parce que l’eau peut abriter des parasites, vecteurs de maladies. On a aussi plusieurs exemples dans le pays de puits situés hors de la ville et accessibles par un tunnel creusé sous la roche. La datation de ces structures est toujours sujet d’âpres controverses entre les archéologues.
Un doctorant dominicain a évoqué les difficultés historiques nées depuis une vingtaine d’années, autour de l’histoire biblique. En fait, dans les années 60, quand les archéologues fouillaient des lieux cités dans la Bible, avaient tendance à attribuer à David et Salomon les vestiges les plus monumentaux, puisque la Bible les associait à un royaume puissant et opulent… Depuis les années 1990, l’archéologie a acquis beaucoup de résultats et on s’aperçoit que ces grands ensembles sont en fait plus récents, il a fallu “rajeunir” les vestiges. Et on s’aperçoit que le royaume unifié de David et Salomon si abondamment décrit dans la Bible était vraisemblablement une réalité beaucoup plus humble… Mais les archéologues travaillent…


Hier, mardi, nous avons évoqué les relations de Canaan avec les empires qui l’entouraient au Bronze récent (1 550–1 200 av. J.-C.) : on pense bien sûr à l’Égypte, aux Hittites. Mais ce fut, pour moi, l’occasion d’apprendre l’existence du Mitanni, un immense empire qui se situait au nord de l’Iran-Irak actuels. Leur capitale a un nom imprononçable et personne ne sait encore où elle était… Avis aux archéologues amateurs…
L’après-midi, Rosemary nous a présenté quatre lieux que nous visiterons la semaine prochaine : Sichem (actuelle Naplouse) ; Megiddo (la fameuse Armageddon de l’Apocalypse), Haçor et finalement Tirça qui fut capitale du royaume d’Israël. C’était une présentation très méthodique : situation, localisation, ressources, histoire des fouilles, époques d’occupation du site, sources historiques extra et intra-bibliques, vestiges visibles caractéristiques.
Ce mercredi, nous sommes entrés dans l’âge du Fer (à partir de 1 200 av. J.C.). À cette époque, les cités-états de la région ont disparu, sous l’influence des « peuples de la mer ». Finalement, la région est passée sous la domination successive, plus ou moins forte et violente de l’Égypte, de l’Assyrie, des Babyloniens et des Perses. Les diverses interventions ont évoqués différents aspects historiques de ce phénomène. On a évoqué, par exemple, la participation du roi d’Israël, Achab (celui à qui Élie s’oppose) à la coalition d’Hadad-Ezer contre l’empire néo-assyrien.
L’après-midi, deux courtes interventions de doctorants de l’École qui étaient très intéressantes. La première tenait en quatre phrases que nous devons retenir jusqu’à la fin de nos jours. Les voici…

  • Assyria conquers Israel ;
  • Babylon conquers Assyria ;
  • Babylon conquers Judah and exiles some ;
  • Persia conquers Babylon and sends some home.
Sinon, Mila a parlé de la Samarie sous la période perse (entre 539, le retour d’exil, et 330, conquête d’Alexandre le Grand). Enfin, un dernier topo sur le phénomène religieux à l’époque (quels sont les lieux typiques, les divinités adorées en Canaan…)
Le prof a commencé avec presque une heure d’avance puisque les deux premières interventions de l’après-midi ont été plus courtes que prévues. Mais il est en train de rattraper son avance et on va finir par terminer en retard… En ce moment, j’entends le muezzin de la mosquée voisine de l’ÉBAF, ça veut dire que c’est l’heure du coucher du soleil… Il chante clairement « Allahû akbar » J’y reconnais la racine kbr qui veut dire « grand » ; dans ma leçon d’arabe, on disait « al-quds medine-kbire » c'est-à-dire « Jérusalem (la sainte en arabe) est une grande ville ».

À bientôt,
Étienne+

Aucun commentaire: