dimanche 15 mai 2016

Je répandrai mon Esprit sur toute chair (Jo 3,1)

אשפוך את־רוחי על־כל־בשר
ˀešpôkh ˀet-rûḥî ˁal-kol-baśar

Chers amis,
Comme le commentaire du dernier billet vous l’a révélé, c’était jeudi mon anniversaire : la municipalité avait donc organisé un feu d’artifice une fois chantées les premières vêpres de la solennité… Non, c’était pour la fête nationale. Mais j’ai apprécié la coïncidence des dates !
La journée a été malgré tout assez ordinaire (sauf que les rues étaient quasiment vides). J’ai travaillé à la Bibliothèque sur les malédictions que l’on trouve dans l’Apocalypse… J'ai aussi fait le deuil de mon stylo quatre couleurs qui a dû tomber la semaine dernière, dans la sacristie de campagne de la mosquée de l'Ascension, quand j'ai enlevé mon aube.
En fin d’après-midi, notre professeur de topographie a donné une conférence passionnante sur ses recherches à propos de l’urbanisme de la Vieille Ville de Jérusalem. Tout est parti de la datation de l’Arc de l’Ecce Homo, situé au départ du Chemin de Croix. Au Moyen-Âge, les Franciscains ont pensé que c’était le lieu de la condamnation à mort de Jésus, là où Pilate a montré Jésus flagellé à la foule en disant : « Voici l’homme » (Ecce Homo en latin). Cette hypothèse  prévalut jusqu’au début du xxe siècle lorsque le monument fut reconnu comme un arc de triomphe construit sous l’empereur Hadrien en 130-135 ap. J.-C. Un peu trop jeune, donc, pour avoir été connu par Jésus, surtout qu’entre-temps le consensus des historiens a transporté le lieu de la condamnation de Jésus de la forteresse Antonia (Arc de l’Ecce Homo) à la Citadelle de Jérusalem (actuel musée de la Tour de David) complètement à l’ouest de la Vieille Ville.
Or, depuis une trentaine d’années, certains historiens, archéologues et autres refusent cette datation de l’Arc… Sur des critères stylistiques, ils pensent que ce n’est pas un arc de triomphe et surtout pas de l’époque d’Hadrien (la décoration est trop sobre). L’arc serait en fait plus vieux de 140 ans et aurait été construit par Hérode sur le modèle des portes de ville de l’époque de l’empereur Auguste (27 av. J.-C.–14 ap. J.-C.) : il nous a montré les portes d’Aoste, de Nîmes, de Rimini, toutes augustéennes et sobres, alors que l’arc de triomphe de Jérash, incontestablement hadrianique, soutient une décoration très chargée. Mais si nous avons affaire à une porte de Jérusalem à l’époque d’Hérode, cela signifie qu’il y aurait un mur et des rues…
Je ne vais pas plus loin car c’était assez long à expliquer mais assez génial à écouter. En gros, il remet en cause tout ce que l’on dit à propos de l’histoire de ce quartier.
Retour au Collège. Vendredi studieux, messe à l’Ecce Homo que j’ai donc regardé avec un œil neuf. Et grâce au P. Dominique-Marie, j’ai découvert un itinéraire plus direct et moins bondé pour me rendre à la basilique ! Merci !
Marie qui fait tomber les murs
En fin d’après-midi, je suis parti en bus vers Bethléem avec le P. Matthieu, étudiant à l’École. La petite équipe de jeunes français se préparant à la confirmation vivait un temps de retraite au monastère de l’Emmanuel qui se situe juste de l’autre côté du mur de séparation. Devant l’entrée du monastère, une icône de Marie qui fait tomber les murs a été peinte pour porter dans la prière l’enjeu de la paix dans ce pays afin que tous les murs, intérieurs et extérieurs, tombent.
Ce soir-là, célébration pénitentielle pour vivre la miséricorde. Puis repas du Fils prodigue, un peu festif. Le P. Matthieu est rentré à Jérusalem pour pouvoir étudier.
Un petit film pour la soirée (avec quelques chamallows casher).
Le lendemain matin, prière à 8h30 (avant j’avais pu prier et avoir l’office avec les sœurs : ce sont des bénédictines mais de rite grec-catholique). Au petit-déj’, j’ai été impressionné : soit les jeunes sont bien élevés, soit ils n’aiment pas le Nutella® (je laisse leurs mères en juger). Mais ils n’en ont pratiquement pas pris alors qu’habituellement, avec les ados, c’est un peu la curée…
Temps de lectio divina avec eux (Ac 12-14) pour introduire à la prière ; temps perso de lecture d’Ac 2 (le récit de la Pentecôte).
Messe dans la chapelle du monastère.
Comme les sœurs sont de rite byzantin, il y a une iconostase. J’ai donc célébré une messe latine dans une chapelle byzantine. Dans la tradition byzantine, pour montrer que ce qui importe, ce n’est pas ce que l’on voit (l’aspect de l’eucharistie demeure celui du pain et du vin) mais ce que l’on entend puisque « la foi vient de ce que l’on entend » (Rm 10,17).
Repas avec les sœurs sous le préau, il faisait une chaleur… Ce WE il a fait chaud comme une chaude journée d’été par chez nous (Il a fait 38° aujourd’hui !).
Dans l’après-midi, fin du film de la veille et reprise avec le groupe du déroulement de la célébration. Les mamans sont venues chercher les enfants à 17h.
En soirée, repas au resto avec Jérôme et Marie-Hélène, cousins lointains et amis du temps de mes études à Rome. Ils sont à Jérusalem et en Terre Sainte pour la semaine.
Après le bon repas chez Rossini (le Fukhara de poulet était à tomber par terre), je les ai raccompagnés vers le Mont des Oliviers où ils logent. En rentrant au Collège, le Frère Miguel était devant la télé pour regarder l'Eurovision : il avait un petit carnet dans lequel il notait soigneusement ses impressions sur les "artistes" qui se produisaient. Ça m'a fait rire !
Aujourd’hui, fête de Pentecôte. Pour les frères, c’est aussi le jour (15 mai) où ils célèbrent leur saint fondateur : Jean-Baptiste de la Salle.
Rendez-vous à 9h30 près du consulat pour être récupéré par Anne-Cécile, la maman d’Henri, et arrivée à Abu Gosh à 10h00 pétantes.
Belle célébration de la Pentecôte : les frères et sœurs d’Abu Gosh chantent l’ordinaire de la messe en grégorien mais ajoutent l’un ou l’autre moment en polyphonie. L’évangile est accompagné à la kora sénégalaise (certains disent le gaffophone : sauf que la kora a un joli son cristallin moins destructeur que le gaffophone) ce qui donne à la proclamation une note de joie toute particulière : c’est vraiment une bonne nouvelle.
Le P. Abbé, Charles, qui leur a donné le sacrement par délégation du Patriarche, a fait une très belle homélie, bien adaptée aux jeunes. Il faut dire qu’il les connaît bien, car il les voit presque chaque dimanche à l’abbaye.
Je regardais aussi les fresques d’Abu Gosh si belles et en même temps endommagées par le temps et la fureur des hommes… Comme s’il nous était donné de voir quelque chose de la beauté du ciel, mais seulement de manière partielle, incomplète, pour que nous puissions désirer en voir la totalité pour en jouir. Le regard de ces personnages se dérobe, nous empêchant d'être happé par ce Visage qu'ils contemplent.
Après la messe, les familles avaient décidé de ne pas rentrer chacun chez soi mais d’offrir un buffet familial : taboulé levantin, houmous, crudités, brochettes, et pâtisseries maison. Le vin était abondant mais je n’en ai pas pris : à la messe, j’avais donné la communion au Précieux Sang et le calice était assez gros et bien rempli… J’ai dû le terminer à la fin… Et avec la chaleur de cette journée, j’étais un peu pompette…
En tout cas, c’était très sympathique (mais cela n’aurait pu être différent puisqu’il n’y avait que des gens sympas).
Vers 16h30, tout était rangé, plié (merci à tout le monde). Retour à Jérusalem. Douche, oraison, repos…
Au repas de ce soir, ce fut léger. Mais Frère Daoud avait préparé un bon gâteau d'anniversaire pour moi. Vous me voyez là en train de le découper.
C'était juste ce qu'il fallait pour célébrer la fête.
Juste un peu de temps pour mettre en forme cet article.
Cette semaine, les étudiants de l’École partent en Jordanie. Leur programme était alléchant mais connaissant déjà les lieux, j'ai préféré rester ici pour étudier. Espérons que cela sera profitable.
Réponse à l’énigme mathématique du dernier billet : le sept n’est pas engendré (c’est un nombre premier) et il n’engendre pas dans la décade (on ne peut pas le multiplier par un entier pour trouver un nombre entre 1 et 10)… Cette propriété fascinait les anciens… Allez savoir pourquoi.
À bientôt,
Étienne+

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