Εἱστήκεισαν δὲ παρὰ τῷ σταυρῷ τοῦ Ἰησοῦ
Eistêkeisan de para tô staurô tou Iêsou
Chers amis,
Drôle de vendredi saint que celui-ci ! Pour les chrétiens occidentaux, c’est
le vendredi saint ; pour les musulmans, c’est un vendredi de Ramadan ;
et pour les juifs, c’est la veille de Pessah (la Pâque juive).
Ce matin, comme à l’accoutumée, j’ai entendu le “coup de canon” du Ramadan,
vers 4h50. Rien qui puisse me réveiller… Je me retourne dans mon lit et c’est
reparti pour une heure. Sauf que…
Sauf que, les détonations ont continué… On entendait le muezzin et divers
boums, bang, plus ou moins sourds ou secs. Au bout d’un moment, je me suis levé
et suis monté sur la terrasse des Frères. Comme c’est le bâtiment le plus haut
de toute la Vieille Ville, on voit un peu de l’esplanade des Mosquées. Là, j’ai
vu quelques éclairs, des étincelles, un nuage de fumée et des gens qui couraient
vers le Nord…
Ça a toutefois eu l’air de se calmer. Malgré tout, il y a eu des dizaines de
blessés et des échauffourées dans la mosquée Al-Aqsa. Tout ça ne va pas calmer
les esprits…
Je suis tout de même allé assister à l’office du Vendredi saint au
Saint-Sépulcre. De toutes les célébrations de la semaine sainte, c’est la plus
stressante : elle se déroule dans la chapelle haute partagée par les Grecs
(au nord) et les Latins (au sud) au niveau du Golgotha (moins de 100 m²).
Une fois qu’on y a mis le Patriarches, les chanoines du Saint-Sépulcre, les
évêques, les séminaristes, les franciscains, le chœur de la Custodie… Il ne
reste pas beaucoup de place.
Comme la basilique est fermée avant la célébration, les gens qui veulent y
participer se massent devant en espérant pouvoir avoir une place là-haut. Des
barrières empêchent les gens de s’approcher, mais certains jouent des coudes
pour passer : la soutane aide grandement.
Ce matin, arrivée du Patriarche latin de #Jérusalem (@medialpjfr) et ouverture des portes du Saint-Sépulcre pour l'office de la Passion. pic.twitter.com/t30hM29REE
— P. E†ienne Jonqنet (@PEtienneJ) 15 avril 2022
Finalement la procession du patriarche arrive, drainant dans son sillage
quelques fidèles avisés qui pourront ainsi se glisser avant tout le monde. Le
gardien ouvre les portes. Et la procession peut rentrer. Tout le monde s’engouffre
dans la basilique, mais l’accès à la chapelle haute est bloqué pour que les “officiels”
puissent y accéder. Entre temps, le patriarche et les chanoines vont s’habiller
dans la chapelle des Latins. Pour ma part, me retrouver quiché pour ne rien
voir (et dans les circonstances sanitaires actuelles, un coup à se retrouve
dans un foyer épidémique), ça ne m’emballait pas trop. Comme il y a six ans, j’ai
participé à la célébration d’en bas. Dans le déambulatoire, j’ai trouvé un coin
de pierre où je peux poser une demi-fesse, en face du rocher du Golgotha
visible à cet endroit derrière une vitrine.
Le Patriarche est arrivé, précédé et suivi de la procession des officiels.
Ensuite, ce fut un peu la curée pour accéder à la chapelle. En voyant les kawas
filtrer les passages, je me suis dit qu’il y avait un étrange retournement de
situation. Le jour de la crucifixion de Jésus, l’assistance était plutôt
féminine ; aujourd’hui, elle est presqu’exclusivement masculine. Évidemment,
avant, il fallait risquer sa vie pour y être ; maintenant, c’est un
honneur !
J’avais emporté mon Missel des dimanches pour pouvoir suivre la célébration
mais en fait, nous étions assez nombreux “en bas” et les franciscains ont
largement distribué des livrets multilingues.
Sauf que j’ai raté le début de la célébration… Les kawas en étaient encore à
faire monter au compte-gouttes les gens qu’on a entendu : « Verbum
Domini ! Deo gratias ! » Ça alors, la première lecture se
terminait ! Le Patriarche ne célèbre pas, il galope…
Nous avons suivi d’en bas la proclamation de la Passion. Le lecteur et les “autres
personnages” s’entendaient bien mais celui qui tenait le rôle de Jésus
(registre assez bas) n’avait aucune puissance. Mais en suivant sur le livret,
on y arrivait, surtout grâce au chœur de la Custodie qui chante en polyphonie les parties de la foule.
Depuis le déambulatoire de la Basilique, écoute de la Passion. Vers 00'24, on entend "Dicit ei Pilátus : Quid est veritas?" pic.twitter.com/y8Ait3syN7
— P. E†ienne Jonqنet (@PEtienneJ) 15 avril 2022
Le recueillement était impressionnant alors que nous n’y voyions rien. En suivant sur le livret en latin, je remarque qu’au moment de la mort de Jésus, le diacre dit : Et inclinato cápite 𝐇𝐢𝐜 trádidit spíritum, c’est-à-dire “Puis, inclinant la tête, il remit 𝐈𝐜𝐢 l’esprit”. (Jn 19,30)Un peu plus tard, la foule (interprétée par le chœur de la Custodie) chante "Ave, Rex Iudæorum!" Salut, roi des Juifs. pic.twitter.com/gvSVw0VxoK
— P. E†ienne Jonqنet (@PEtienneJ) 15 avril 2022
La grande prière universelle est aussi un peu plus longue qu’ailleurs :
une intention se glisse après la 5ème (Pro unitate Christianorum)
et s’intitule Pro Peregrinorum : « Prions aussi pour les
pèlerins qui, mus par leur foi, fréquentent ces lieux saints, lieux de notre
rédemption : afin qu’en célébrant ici le mystère pascal du Christ, ils Le
rencontrent, Lui le Dieu vivant et vrai, et qu’ils soient conduits, par Lui sur
le chemin de la vie nouvelle. » À quoi l’oraison répond : « Dieu
éternel et tout-puissant, soutiens tes fidèles pèlerins dans ces lieux saints ;
remplis-les de la force et de la lumière du Saint-Esprit, afin qu’en retournant
chez eux, plus forts dans la foi et renouvelés par les saints mystères, ils
manifestent à tous la vie chrétienne. Par Jésus… »
En bas, il n’est pas envisageable de vénérer la croix… On fera ça après la
célébration. Mais la communion sera distribuée. À la sortie, je retrouve Henri
(qui était en haut) et Cyriaque (en bas lui aussi). Nous machinons un
rendez-vous pour le lundi de Pâques.
À cause de la concurrence “Pâques-Ramadan”, le chemin de croix est avancé à ce
matin. L’après-midi, il aurait été inenvisageable que le flot des chrétiens
croise celui des musulmans.
Je suis rentré au Collège.
Repas léger avec les Frères.
Après-midi reposante. Puis je suis allé faire mon chemin de croix calme, dans
un coin peu fréquenté. Je suis aussi passé par la cathédrale arménienne où j’ai
pris un air de Vêpres et ai fini par faire oraison au Cénacle. Pas un chat !
Pourtant, c’était là où se tenaient les disciples le vendredi saint.
En descendant du Cénacle, je fais un tour par le “Tombeau de David”, et passe devant une salle où le seder, le repas pascal juif, est prêt : assiette, carafe de vin, chandelles... Ne manque plus que les convives...
En descendant du Cénacle, je fais un tour par le “Tombeau de David”, et passe devant une salle où le seder, le repas pascal juif, est prêt : assiette, carafe de vin, chandelles... Ne manque plus que les convives...
Je reviens en faisant un bon petit tour : Dormition (fermée pour travaux) ;
murailles, Parc Teddy Kolek, Yemin Moshe, Tombe de la famille d’Hérode,
Consulat de France, Mamilla.
Alors que je rédige ce post, j’écoute la Passio d’Arvo Pärt mais je suis
dérangé par des tambours ! Encore ! Je regarde par la fenêtre et vois
passer la procession funèbre de la paroisse latine. Les scouts portent une
figure du Christ dans un drap blanc, d’autres suivent avec les herbes et les
aromates. Puis, les ministres, le chœur et les paroissiens.
Ce soir, il y a la procession de la mise au Tombeau avec les Franciscains. Mais trop de monde...
Que Dieu vous bénisse en ce vendredi saint.
Que Dieu vous bénisse en ce vendredi saint.
Étienne+
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