mercredi 27 mars 2019

Qu’êtes-vous allés voir dans le désert ? (Lc 7,24)

τί ἐξήλθατε εἰς τὴν ἔρημον θεάσασθαι
ti exèlthate eis tèn erèmon theasasthai

Chers amis,
Depuis mon dernier billet, les premiers jours ont été calmes… Travail en bibliothèque, etc.
Samedi après-midi, j’ai fait un petit tour. En fin d’après-midi, je suis allé à l’École biblique pour assister à un spectacle (donné par la même troupe que le lundi précédent) sur Charles de Foucauld, c’était pas mal du tout.
Dimanche, j’avais demandé à Laurence et Laurent-Pierre si je pouvais compter sur eux pour me conduire à Abu Gosh… Leur réponse était non seulement positive mais en plus ils me proposaient d’aller (re)découvrir Césarée maritime avec leurs amis en visite. J’ai sauté sur l’occasion !
Nous sommes arrivés un peu en avance à la messe puisqu’Antoine, l’ami de Laurence et Laurent-Pierre, devait jouer de l’orgue lors de la messe et voulait faire connaissance avec l’instrument un peu avant. Belle messe, même si la communauté masculine était réduite… Le P. Abbé avait été hospitalisé en urgence dans la nuit et deux frères étaient auprès de lui. Mais un archevêque en retraite à l’abbaye a présidé l’eucharistie. Pas mal de monde dans l’assistance, dont un gros groupe de lycéens du Collège des Frères (la messe a été un peu longue pour eux…)
Après la messe, nous avons tout de même pris le temps de l’apéritif. Je salue un gars qui me dit : « Bonjour, Étienne ! » et je réponds : « Oui, c’est bien ça ! » avant de réaliser que le type ne me saluait pas mais se présentait… J’ai donc fait connaissance avec Étienne, un médecin français, installé à Ein Karem et qui a enseigné la médecine en Israël. Il fait partie du comité d’éthique israélien.
Puis, nous sommes partis vers Césarée, mais il était déjà 1 heure… Arrêt pour acheter du pain à la sortie du village d’Abu Gosh et une bonne heure de route avant d’arriver à Césarée. Pique-nique devant l’aqueduc, il faisait du vent mais le soleil nous réchauffait. Le pique-nique était un peu improvisé avec hummus, pita, purée d’aubergines, tranches de fromages et même la fameuse “dinde reconstituée” qu’on trouve dans tous les bons supermarchés de Jérusalem.
Porte croisée (xiiie s.) de Césarée
Puis nous nous sommes avisés que l’heure avançait… Nous remontons en voiture, mais un contretemps nous a fait rebrousser chemin : une histoire de cache d’appareil-photo (miraculeusement – je pèse mes mots – retrouvé). Arrivé à l’entrée du site, il était déjà 15 h 30, bien sonné. Le guichet était fermé mais l’accès ouvert… Nous avons donc visité la partie croisée de la ville de Césarée (cela m’a permis de comparer avec Belvoir, visité trois semaines plus tôt). Et depuis une petite terrasse nous avons admiré la ville antique (romaine et byzantine) mais l’accès à ces parties était fermé. Il faut dire que les sites ferment à 16 h et en Israël, on ferme plutôt à 15 h 55 qu’à 16 h00. Pas de cadeau au patron !
Nous avons tout de même flâné sur la jetée du port, admiré la ville depuis le large. Et puis nous avons pris un lemon mint sur le port. La terrasse était très agréable. Le café diffusait de la musique… Nous avons donc eu droit à l’intégrale de Julio Iglesias, en français. Et à un moment est arrivée la chanson que nous attentions tous : Je n’ai pas changé et nous avons tous bien ri en évoquant quelques souvenirs cinématographiques.
Alectoris graeca de la maison des oiseaux
 Nous avons quitté le site sous la belle lumière du soir, petit retour vers l’aqueduc pour admirer la maison des oiseaux.
Retour vers Jérusalem et nous avons dégusté une petite soupe de courgettes, des pâtes et une omelette (mon Dieu, une omelette ! c’est si rare ici, incongru même dans l’esprit des locaux).
Lundi, travail en bibliothèque toute la journée après avoir célébré la messe de l’Annonciation à l’Ecce Homo. En fin d’après-midi, j’ai envoyé une vingtaine de pages à Anthony. Le soir, je suis retourner dîner à l’Ecce Homo avant la veillée « Lavement des pieds, adoration, confession ». Une cinquantaine de jeunes s’était retrouvée. Deux sœurs du monastère de l’Emmanuel sont venues faire un petit topo sur ce geste du lavement des pieds avant de le faire au groupe. J’ai participé au lavement des pieds puis j’ai confessé dans le lithostrotos. Belle soirée priante et pleine de grâces.
Ce mardi… je dois confesser avoir succombé à la tentation… Dimanche matin, Michèle me propose d’aller voir le site d’ʿAin el-Maʿmoudiyeh, près d’Hébron, « avec une voiture pleine de nanas » précisait le message… Rassurez-vous je n’ai pas joué au coq de basse-cour, ni même au chevalier servant… Si j’ai succombé à la tentation, ce n’est pas pour « les nanas », mais pour ʿAin el-Maʿmoudiyeh, qui est un des sites le plus charmants de Terre Sainte.
Départ à 8 h 30 devant l’entrée de Mamilla puis une petite heure de route jusqu’à Hébron. La campagne est magnifique, les agglomérations moches. On tâtonne un peu pour retrouver le chemin de Taffūḥ et on arrive au fond du wādī.
Le site d'ʿAin el-Maʿmoudiyeh
Nous retrouvons l’équipe de fouilles. Si vous relisez mon billet de mai 2016, vous avez déjà quelques renseignements sur le site. Depuis, trois ans, Bertrand a fouillé un mois chaque année. Je vous laisse le lien vers une contribution rédigée par Bertrand en 2018, avec images, plans et explications. Cette année, ils se sont intéressés au contexte du petit moustier médiéval. Il y a trois ans, ils avaient identifiés des éléments byzantins réemployés et sous les restes médiévaux. En fouillant un peu plus loin, sur la terrasse supérieure, Bertrand et son équipe ont retrouvé des éléments de ce qui est vraisemblablement une église byzantine : quelques jolies mosaïques, des tessons en pagaille… Rien de probant pour l’instant, mais c’est l’interprétation la plus probable. Bertrand nous a ensuite montré la chapelle baptismale, déjà fouillée dans les années 1940 par l’École biblique. Depuis trois ans, Bertrand a soulevé les dalles entre la cuve et l’abside byzantine pour dater le monument… et il a trouvé
un bassin rectangulaire, lui aussi en lien avec la source. L’étude de l’enduit d’étanchéité a permis de le dater du début du Ve siècle au plus tard. L’abside quant à elle n’a pu être construite après 540… Sinon, la partie que Solène fouillait il y a trois ans, au nord de la chapelle, a été recouverte et la vigne y est toujours cultivée. Le linteau byzantin a été brisé pour y découvrir le fameux trésor… Les vandales ont dû être déçus de n’y rien trouver mais les légendes ont la vie dure.
Bertrand Riba dans sa fouille
Regarder le sable gris,
apprêt pour la pose de mosaïques
Puis nous sommes montés à pied au sommet de la colline au sud pour admirer le petit fortin byzantin qui domine le wādī. Bertrand nous a laissé pour retourner à son travail : le chantier se termine jeudi soir et ils doivent terminer certains relevés et reboucher le tout afin que le proprio – un peu jaloux de son bien – retrouve la jouissance de son oliveraie.
Le fortin byzantin est toujours charmant mais un “imbécile” a mis son nom et une date sur la jolie pierre ronde qui fermait la porte du fortin. Mes parents m’ont appris que « le nom des fous est écrit partout » ; ça doit être ça.
Le site est toujours fascinant mais il y a quelques constructions à proximité.
Nous sommes redescendus dans le vallon pour dire au revoir à l’équipe de fouilleurs. Et repartir vers Jérusalem.
J’ai donc passé l’après-midi au Collège à mettre en ordre des tas de choses.
Mercredi retour au travail…
À bientôt,
Étienne+

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