jeudi 25 mai 2017

Jonathan assiégea la citadelle (1M 11,21)

Ιωναθαν περικάθηται τὴν ἄκραν
Iônathan perikathètai tèn akran

Chers amis,
Lundi, Jérusalem était en état de siège (pour la énième fois de son histoire…) à cause de la visite du président américain. L’hôtel King David avait été privatisé pour l’occasion. L’arrivée de l’homme d’état n’était prévue qu’en début d’après-midi mais cela n’empêchait pas les écoles d’être fermées.
L’École Biblique célébrait la fête de saint Dominique (normalement, c’est le 8 août, mais là il est fêté le 24 mai pour que la fête soit célébrée pendant l’année académique). Là, la célébration du 24 mai avait été anticipée au 22 pour coïncider avec les difficultés de circulation dues à la visite présidentielle.

J’avais donc prévu du travail, notamment des lectures.
Après le déjeuner, on a regardé l’arrivée de Trump à Tel Aviv.
Lorsque son hélico s’est posé à Jérusalem, nous sommes montés sur le toit du Collège. Avec un peu de patience, nous avons vu passer le cortège. Il y avait plus de voitures que ne peut en contenir la Vieille Ville. J’ai “shooté” la limousine présidentielle. Puis nous sommes descendus au salon pour regarder les images sur CNN. La Vieille Ville était complètement inaccessible, les gens avaient interdiction de sortir de chez eux, les boutiques étaient fermées. J’ai vu les images de l’accueil devant le Saint Sépulcre. Mais les journalistes n’étaient pas autorisés à rentrer à l’intérieur. Il n’y a donc pas d’image.

Avec les Frères on a rigolé à propos de Melania. “Belle plante”, elle passe de lieu en lieu, le sourire inamovible, pour faire joli sur la photo, mais après elle a l’air  complètement absente.
Après ça, je suis allé à l’École rencontrer le directeur…
Mardi, j’ai retrouvé mon bureau à la bibliothèque. En milieu de matinée, j’ai regardé quelques images de Trump à Bethléem. Je bosse sur les imprécations et les oracles de malheur dans la Bible (c’est un peu l’anti-béatitude…)
Sinon, rien à signaler…
Mercredi, messe le matin, bibliothèque, toujours dans les oracles de malheur. C’était donc Yom Yerûshalayim, l’anniversaire (dans le calendrier hébraïque) de la “libération” de Jérusalem par les Israéliens à l’issue de la Guerre de six jours. Encore une fois, c’était l’occasion (ou le prétexte) à des festivités, cérémonies officielles, gamins en stabulation libre dans les rues de la Ville… En rentrant de l'Ecole, je me disais que ce mois de mai, entre les célébrations juives (Yom haShoah, Yom Yerûshalayim, Lag Ba'omer), les fêtes chrétiennes, les grèves palestiniennes en solidarité avec les prisonniers qui font la grève de la faim, les visites présidentielles paranoïaques, les écoliers n'étaient pas trop allés en classe ces derniers jours. Alors que j'ai bien profité de la bibliothèque. Pour couronner le tout, les musulmans commencent le Ramadan, samedi ou dimanche...

Et surtout, la fameuse marche des nations, une immense procession durant laquelle les gens convergent vers le Mur occidental. Ils se rassemblent sur Kikar Tsahal, juste derrière le Collège. Évidemment, les Israéliens sont tout contents et les Palestiniens tirent une tête d’enterrement, surtout que cette année, ce sont les cinquante ans de l’événement.

La foule était impressionnante, musique à fond, drapeaux israéliens de rigueur (les gens sont très drapeau dans le pays). Beaucoup de “colons” venus de leurs implantations, dont le nom était inscrit sur des banderoles. Mais aussi une contre manifestation avec des panneaux du genre "Jérusalem par là ; Al-Quds par ici", ou "Le racisme, c'est la peur", "Juifs et Arabes ensemble", "Deux Jérusalem, une seule paix", "Pas de sainteté dans une Ville occupée"... Évidemment, des barrières et des policiers empêchaient les deux manifestations de se rencontrer de trop près...
Ce soir, je me suis couché tôt… Pour me lever tôt. Je suis monté au Mont des Oliviers de nuit. En passant devant Sainte-Anne, les gens installaient des illuminations pour le Ramadan. Ça évoque pour nous les décorations de Noël. Le but de mon pèlerinage nocturne sur la montagne était de célébrer la messe de l’Ascension à la mosquée du même nom… Oui, vous avez bien lu, la mosquée. En ce lieu, considéré traditionnellement comme celui où Jésus est monté au ciel, une église fut élevée au ive siècle. Détruite par les Perses en 614, retapée ensuite, elle sera aménagée dans son état actuel par les croisés au xiie siècle. À la chute du royaume latin de Jérusalem, l’église devient mosquée puisque les musulmans considèrent Jésus comme l’un des plus grands prophètes, conçu virginalement et monté au ciel. (Ceci dit pour les musulmans, Jésus n’est pas mort sur la croix – Simon de Cyrène s’y est collé – et donc il n’a pas eu besoin de ressusciter). C’est bien lui qui viendra à la fin des temps pour juger les vivants et les morts.
L'Imbomôn, mosquée de l'Ascension
À l’heure actuelle, le bâtiment consiste en une cour octogonale d’une douzaine de mètres de diamètre, dans laquelle se dresse au centre un édicule circulaire (moins de quatre mètres de diamètre). Le jour de l’Ascension, les chrétiens sont autorisés à y célébrer la messe, à cause du fait qu'il y a eu une église avant. Lorsque la fête ne coïncide pas chez les Latins et les Orientaux, chacun dispose du lieu toute la journée ; cette année, il y a un calendrier de célébrations successives, régi par le statu quo de 1852. Les Latins disposent du lieu de minuit à 7 h du matin. Chaque demi-heure, une messe est célébrée dans l’édicule central. La messe de 0 h 30 était présidée par le Fr. David, un jeune franciscain québécois et il avait proposé à quelques volontaires français de l’accompagner, je me suis joint à lui. J’ai donc eu la grâce de célébrer la messe dans l’Imbomôn (c’est le nom de l’édicule, cela proviendrait de l’araméen bâmâ, “hauteur”, c’est en tout cas le nom que lui donne Égérie, la fameuse pèlerine du ive siècle, originaire du nord de l’Espagne ou du sud de la Gaule, qui nous a laissé un récit de son pèlerinage en Terre Sainte, source incomparable pour la connaissance de la liturgie de Jérusalem à cette époque).
La messe devait commencer à 0 h 30, mais la messe précédente célébrée par les franciscains du couvent de l’Agonie a été plus longue que prévue. Du coup, le temps qui nous était imparti était réduit d’autant. Il faut dire que célébrer une messe de l’Ascension (gloria, deux lectures, homélie de rigueur un jour de solennité, credo, éventuellement une prière universelle) en trente minutes relève de la gageure. Défi relevé par le Fr. David. Au début, j’étais un peu inquiet que la foule circule dans l’édicule tout au long de la messe, en fait, ce fut simplement au début. Très vite le recueillement s’est fait. Mais comme j’étais avec des gens pieux, une fois de plus, je n’ai pas de photo de la messe (cliquez sur ce lien, il y a quelques photos qui vous donnent un aperçu de l'ambiance, si vous parlez le catalan, vous pouvez lire). À la fin de la messe, nous nous sommes souhaités bonne fête et Cyrille et Marianne nous ont redescendus à nos portes de Vieille Ville respectives. Les murailles de la Vieille Ville et la Porte de Damas sont tout illuminées.
Bon dodo.
À bientôt,     
Étienne+

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