mardi 9 février 2016

Ses sœurs ne sont-elles pas ici ? (Mc 6,3)

οὐκ εἰσὶν αἱ ἀδελφαὶ αὐτοῦ ὧδε
ouk eisin hai adelphai autou hôd

Chers amis,
Une semaine déjà que je garde le silence, si l’on excepte le petit message rapide d’hier matin.
Mercredi et jeudi, ainsi que vendredi matin, je suis resté à la bibliothèque. Lecture d’un gros livre sur la Théologie de la lettre. Les 200 premières pages m’ont donné du fil à retordre mais dès que l’auteur commence à lire pour de bon l’Écriture sainte… Ça devient lumineux et fascinant et pour mon travail, ce livre ouvre des perspectives plus larges que je ne l’imaginais au départ.
Vendredi midi, comme à l’accoutumée, messe à l’Ecce Homo. J’y rencontre une jeune femme de la communauté du Chemin Neuf qui travaille à Safed dans un laboratoire de biologie et je retrouve les habitués de la maison, si gentils.
Après un repas léger mais fraternel, je rentre au Collège (c’est tout droit, il suffit de monter). Dans l’après-midi, je vais à Abu Tor, près de la route d’Hébron accueillir mes deux sœurs, Guilhemette et Blandine, qui viennent passer quelques jours en Terre Sainte. Finalement, au lieu d’aller se balader tout de suite en profitant du soleil qui brillait… mes sœurs se sont reposés d’un voyage qui s’est passé sans encombre mais imaginez l’heure à laquelle elles se sont levées si vous savez que leur avion décollait à 6h40…
En début de soirée, Anne-Cécile, leur hôtesse (un grand merci), nous dépose près de la Porte de Jaffa. Auparavant, nous passons au Consulat pour récupérer les papiers et la clé d’une 807 de collection mise à disposition par d’autres amis. Trop sympa.
À la Porte de Jaffa, repas chez Rossini, où j’avais dîné avec le P. Pierre le 29 décembre dernier. Ce restaurant se trouve en face de l’Hôtel Gloria. Le serveur parle un peu le français (ancien des Frères, tout s’explique). Je craque à nouveau pour le tajine de poulet, dont je n’arrive pas à retenir le nom arabe.
Petit tour rapide dans la Vieille Ville puis retour à pied à Abu Tor.
Samedi, il faut se lever pas trop tard… En effet, j’ai réservé une messe à 9h à la grotte de la Nativité, sur l’autel de la mangeoire. La famille d’amis qui accueillait Guilhemette et Blandine a sacrifié la grasse matinée du samedi pour se joindre à nous. Sur le papier de réservation de la messe, il était marqué qu’on devait être là 10 minutes avant l’heure de la messe… Nous étions donc sur place à 8h50. C’était sans compter le fait que la liturgie arménienne qui me précédait devait se conclure par un passage de plumeau pour déplacer la poussière dans la grotte (je n’ose dire “nettoyer”)… La messe a donc pu commencer vers 9h20… Cela a laissé le temps au P. Konrad, un prêtre polonais pèlerin de me demander s’il pouvait concélébrer. Bienvenue !
Messe à l'autel de la mangeoire
L’accès à l’autel de la mangeoire a été sportif. Les célébrants entrent dans la grotte par l’escalier de sortie et croisent donc les pèlerins qui ressortent après avoir accompli leurs dévotions. Dans la grotte, un groupe de pèlerins asiatiques prenait d’assaut la mangeoire, et heureusement que le service de la basilique nous a ménagé la place pour que nous puissions célébrer sans heurts… Finalement la messe est assez calme, les autres groupes se contentant de passer silencieusement en respectant la prière. Nous pouvons chanter quelques chants pour célébrer cette messe de “l’Épiphanie”.
Après la messe, rapide visite de la Basilique puis flânerie dans les ruelles de Bethléem. Nous traversons le souk, bien moins touristique que celui de Jérusalem. Café sur une terrasse de la Place de la Mangeoire. Puis pieux shopping chez Rony, j’ai fait sa connaissance en janvier dernier lors d’un pélé avec une équipe du diocèse d’Avignon. C’est une famille catholique latine qui tient un négoce depuis 1927. Rony est très fier d’avoir chanté pour le Pape François, il y a deux ans. Il nous a aussi montré le clip de “Trouver dans ma vie ta présence” en arabe, c’est lui qui chante. Nous remarquons que les paroles sont plus explicites que dans la version française où, comme dans beaucoup de chants de la même époque, on cherchait à dire la foi sans les mots de la foi.

Il commençait à “faire faim” et nous avons cherché à emporter un pique-nique… Finalement, ce fut le KFC de Bethléem ! (Dans le typique, local, on fait mieux, je le reconnais).
Nous récupérons la voiture garée dans le parking souterrain de Bethléem. Moment d’angoisse en ouvrant la porte… Elle était restée ouverte pendant les 3h30 de stationnement… Saint Joseph a pallié ma négligence.
Nous filons à l’Hérodion. Nous mangeons sur les tables de pique-nique. Le soleil brille et le vent souffle en tempête. Cela donne de belles photos avec des contrastes lumineux. Après avoir vu le docu-fiction (chef d’œuvre de la production cinématographique locale…) nous faisons le tour du site. La sortie des tunnels est fermée et nous devons remonter les marches (qui ne sont pas ISO 9002 !). C’est dans la forteresse de l’Hérodion que la photo du message précédent a été prise.
Panorama de l'Hérodion
Après l’Hérodion, nous nous dirigeons vers Mar Saba, un monastère orthodoxe du désert de Judée, fondé à la fin du ve siècle par saint Saba (c’est le sens de Mar Saba en arabe). À l’époque byzantine (ive-vie siècles), plus de 70 monastères parsemaient le désert de Judée… Celui de Mar Saba peut s’enorgueillir d’une occupation ininterrompue depuis sa fondation, malgré les vicissitudes de l’histoire. On peut aussi noter la présence de saintJean Damascène (mort en 749), Père de l’Église et défenseur de la théologie des icônes. Pour la Bible, on note aussi la découverte controversée d’un “évangile secret de Marc”, quelques extraits d’une version longue de l’évangile par saint Marc lui-même, découverts en 1959 et aussitôt disparus. Dans les cercles spécialisés, on s’interroge sur l’honnêteté de son découvreur-publieur qui est le seul à avoir vu le texte…
Sinon, le site du monastère est impressionnant : le Cédron, en aval de Jérusalem, a creusé une profonde gorge au bord de laquelle le monastère déploie ses bâtiments. Regardez la jolie vidéo qui suit pour apprécier la beauté du site (à 2'43'').
Comme dans tout monastère orthodoxe, la règle de l’abaton est scrupuleusement observée : les femmes n’y entrent pas. Du coup, avec mes sœurs nous sommes restés autour du monastère à admirer le site. Le fond de la gorge est alimenté en eau mais n’incite pas à la baignade. Il a fallu aussi éloigner les bédouins qui gardent votre voiture et se proposent de vous guider…
Avec Guilhemette devant Mar Saba
En rentrant à la maison, la pluie a commencé à tomber. Passage près du Mont du mauvais conseil pour admirer la vue et regarder les vestiges du canal inférieur hasmonéen (déjà vu dans ce blog, ici et ici).
Passage au collège des Frères pour prendre un thé et une légère collation. Guilhemette a craqué pour le za’tar ! Retour à la maison pour le repas.
Dimanche matin, je récupère Blandine (Guilhemette n’est pas très bien) et nous allons à la messe à Abu Gosh. Nous avons un peu hésité car les frères sont en pèlerinage en Égypte et il ne restait que le P. Abbé et le frère cuisinier, ainsi que quelques-unes des sœurs. La messe a manqué de la beauté habituelle mais la tradition de l’apéritif a été bien respectée. À la sortie, nous retrouvons les familles habituelles.
La tombe de Jésus
Repas à la maison où nous retrouvons Guilhemette requinquée… Dans l’après-midi, balade dans les recoins de la Vieille Ville, quartier juif, cardo, souk, Mur occidental, bâtiments mamelouks. Nous passons au Saint-Sépulcre pour une brève visite. Nous arrivons pendant la procession arménienne. Finalement, nous nous collons à la file d’attente et nous ne patientons que deux minutes pour aller prier dans la Tombe. Chouette !
Nous continuons vers la rue de Jaffa et remontons jusqu’à Maḥane Yehuda. C’est dommage, le souk est en train de fermer. Nous trouvons un resto casher dans la rue de Jaffa. C’est donc un repas חלבי (ḥalavi, laitages) que nous prenons.
Retour à la maison.
Le lever du lundi n’est pas facile… Mais je dois célébrer la messe pour les Frères qui sont nombreux ces jours-ci : le Frère Fadi, visiteur du district Moyen-Orient, est là ainsi que le Frère Leonardo, visiteur de Colombie.
Ce matin-là, nous avons prévu avec Guilhemette et Blandine de visiter la Cité de David. Anne-Cécile nous accompagne. L’achat des billets d’entrée est un peu laborieux, la jeune femme est nouvelle mais, fait notable, très gentille. Nous commençons par voir le petit film 3D, avec le traditionnel couplet romantique. Les effets de relief sont très accentués et légèrement écœurants. Comme la pluie est encore de la partie, nous renonçons à la visite du tunnel d’Ézéchias et préférons le tunnel cananéen. Il y a pas mal de visiteurs et je dois prendre mon mal en patience à trépigner derrière les grosses américaines (honnêtement, le site n’est pas adapté aux personnes à mobilité réduite) qui lambinent pour descendre marche après marche.
Après la visite, Anne-Cécile nous dépose Porte de Jaffa et nous allons déjeuner chez les Frères. Blandine mitraille la vue de la terrasse. Le repas est très sympa, nous sommes dix à table et les Frères très heureux de faire connaissance de mes sœurs.
Dômes de Jérusalem
Nous allons ensuite visiter la Citadelle et terminons l’après-midi par une déambulation ici et là dans la Vieille Ville. Quelques achats de céramique arménienne (hébronite, en fait). Passage à la Porte de Damas pour remonter chez les Frères. Thé, échange des photos. Le Fr. Daoud passe et nous sert une part du gâteau qu’il avait préparé la veille… Miam ! (Je pense à ce moment aux melkites et aux maronites qui commencent le carême, ce lundi…)
Retour à pied chez Anne-Cécile et Christophe. Repas simple.
Ce matin, travail à la bibliothèque…
Sinon, je peux vous annoncer la naissance du nouveau site des Prêtres de Notre-Dame de Vie. Allez visiter sans modération ! Diffusez autour de vous.

Dans laprès-midi, j'ai reçu la visite de Daniel, diacre de Versailles, étudiant du Studium de NDV, et de Kevin, séminariste des MEP et lui aussi, étudiant du Studium NDV. Panorama de la terrasse et café ; échanges de nouvelles et de spécialités gastronomiques saint-didiéroises (Merci !)
Ce soir, avec Daniel, nous avons refait dans le gastronomique. Nous nous sommes décidés pour le Rooftop du centre Notre-Dame. Me voilà obligé de vous écrire à ce propos avant l'entrée en carême sous peine de vous faire pécher par procuration... En arrivant dans le restaurant, je suis surpris de voir qu'il est pratiquement complètement réservé... Je m'interroge. En fait, ces jours autour du mercredi des Cendres (7-12 février, mauvais timing du Consulat) a lieu la semaine de la gastronomie française à Jérusalem et en Palestine #2. Cet événement consiste à faire venir des chefs français dans les grands restaurants de Jérusalem et de Palestine (Naplouse, Ramallah, Bethléem, Hébron) pour qu'ils marient leurs talents avec les produits locaux. Sans lavoir concerté, nous sommes arrivés dans ce restaurant pour la Featuring French Culinary Night (en français dans le texte)... Du coup, va pour les délices françaises avec les produits palestiniens, concoces par le chef Lionel Lévy (Intercontinental de Marseille) et le chef Joseph Asfour (Notre-Dame de Jérusalem).
Avant le début du repas, un monsieur nous accoste en français. Cest le champion du monde du chocolat et il habite à Paray-le-Monial...
Au menu :
Potage Duo de fromages
Crumble de Loup au gingembre et curcuma
Carpaccio de coquille saint-jacques dans un panier de parmesan
Selle d'agneau frotté à la menthe & serpolet
Bonbon de poireaux truffé & Purée soubise
Knafeh avec crême brûlée & pistache 

Le tout arrosé d'un bon chardonnay. Le knafeh est une pâtisserie orientale digne de ce nom (Dès la première bouchée, ça vous remet la glycémie d'un anémique en ordre), bien trop sucrée pour nos palais occidentaux, mais là, c'était le paradis. Daniel ma dit que jaurais dû photographier les plats. Mais en fait, cest quelque chose qui mécœure... Je préfère vous laisser saliver en imaginant les goûts, les saveurs, les couleurs.
Nous avons aperçu le chef Johnny Goric (il a fait la couverture de Terre Sainte Magazine à l'automne). Il a sa soirée en résidence demain au Legacy.
Demain, mercredi des Cendres, jeûne et abstinence. Avec le repas de ce soir, on est prêt pour affronter la rigueur du carême et se retrouver le 27 mars dans la joie de la Résurrection.
Ce sera aussi jeûne et abstinence de bibliothèque puisque celle-ci sera fermée... Nous supporterons cette contrainte avec le plus desprit surnaturel possible.
À bientôt, bon et saint carême,
Étienne+

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Un grand merci Etienne pour nous avoir accompagnées pendant ces 3 jours, ainsi qu'à Anne-Cécile de nous avoir accueillies et supporté la fratrie Jonquet !
Bien rentrées hier soir, sur les rotules, mais heureuses !
Je t'embrasse,
Guilhemette

Unknown a dit…

Je me joins à Guilhemette pour les remerciements ! Ces quelques jours sont inoubliables. Je relis ton blog, Etienne, et les lieux prennent vie et les personnes rencontrées un visage. Profite bien des parents (on pense bien à vous). Blandine