samedi 23 février 2019

Guide pour un voyage inconnu (Sg 18,3)

ὁδηγὸν μὲν ἀγνώστου ὁδοιπορίας
hodègon men agnôstou hodoiporias

Chers amis,
Mon silence vous a peut-être étonnés, surpris ou inquiétés. En fait, j’étais en pélé avec les paroissiens de Saint-Didier et Venasque. Dix jours à arpenter la Terre Sainte avec quarante pèlerins, âgés de 22 à 90 ans… Voici un bref résumé de ce voyage, en style un peu télégraphique.
J’ai récupéré mes pèlerins en fin d’après-midi le 12 février. Pour cela, j’ai pris le tout nouveau train inauguré en novembre dernier. Quelle prouesse technique ! et quelle rapidité. En 25 minutes on passe de la gare centrale de Jérusalem au terminal de l’aéroport. Ça change des sherout qui tournicotent dans la périphérie de Jérusalem. J’ai été impressionné par la gare. Je me demandais où allait s’édifier la gare ferroviaire. Je voyais bien le viaduc qui domine le vallon de Lifta mais je ne voyais pas de gare à proximité de la gare centrale de Jérusalem (qui n’est qu’une gare routière). En fait, la gare ferroviaire est souterraine : on descend dans un puits d’une quinzaine de mètres de profondeur puis, il y a trois vertigineuses volées d’escalators et encore un dernier escalier roulant pour arriver sur le quai : on doit être à au moins 60 mètres de profondeur !
Ensuite, le trajet est surtout souterrain (la moitié du parcours).
Nous embarquons dans le bus, à destination de Kfar haNokdim, entre Arad et Massada. Il s’agit d’un campement bédouin pour les touristes. Accueil sympa. Repas, installation sous les tentes (je dispose heureusement d’une chambre à proximité…) Messe sous la voûte étoilée (c’est la messe du jour dont la première lecture est la création… Petit clin Dieu liturgique).
Messe à Avdat

Mercredi, journée dans le Néguev, avec la visite du site de Beershéva (je l’avais visité en 2007, à l’époque où je n’y comprenais rien…) puis promenade dans le canyon d’Ein Avdat, repas au kibboutz de Sdé Boqer (vu en 1995), puis visite du site d’Avdat avec une belle messe dans l’église sud. Retour à Kfar haNokdim. Le soir, nous avons rencontré Khaled, un bédouin qui nous a raconté leur mode de vie traditionnel. La nuit fut courte ou longue suivant le point de vue : un thé noir avant le repas, un en arrivant chez le bédouin suivi d’un café à la cardamone… Je vous laisse imaginer.
Jeudi matin, nous avons fait un petit tour en chameau. Au début, je n’étais pas trop partant mais finalement, je me suis laissé tenter… Descente dans la vallée de la mer Morte.
Passage à Ein Gedi pour évoquer le roi David et le Cantique des cantiques. Puis Qumrân, où nous avons évité le film “nigaud” selon les mots du spécialiste du site Jean-Baptiste Humbert. Cela nous a permis d’avoir le temps de manger et pour les audacieux de se baigner dans les eaux de la mer Morte. Ah, la délicate impression de se baigner dans un bouillon Knorr® ! Un de mes pèlerins a réussi à se mettre de l’eau dans les yeux…
Puis à 14 h, nous étions à Qasr el-Yahûd, le site baptismal du côté israélien. Dévotions baptismales, messe sous le grand abri. Nous avons eu la chance de passer après un groupe d’orthodoxes roumains qui faisaient une petite liturgie baptismale. Je m’inquiétai de la longueur de la cérémonie et demandai à une dame du groupe de combien de temps auraient-ils encore besoin. Elle me répond : « Pas longtemps, une demi-heure tout au plus »… De la relativité du temps selon les traditions liturgiques… En fait, 5 minutes après c’était fini.
Puis route vers la Galilée. Installation à Kfar Kinneret au bord du lac, c’est un hôtel dans un kibboutz au sud d’En Gev. À cette époque de l’année, c’est calme mais l’été, ça doit être invivable. Ce soir-là, nous avons fait une belle expérience d’échange en petits groupes.
Visite de Chorazim (synagogue)
Le vendredi, journée autour du lac : visite des sites de Chorazim, du Mont des Béatitudes (Disneyland Galilée), que nous avons descendu (de la gadoue jusqu’aux genoux) jusqu’au sanctuaire de la Primauté de Pierre. Puis le traditionnel promène-couillon sur le lac, tout aussi traditionnel Sarotherodon galilaeus (poisson de Saint-Pierre) au déjeuner. De là, nous avons vu Capharnaüm puis le sanctuaire de la multiplication des pains à Tabgha. Belle messe au bord du lac. J’ai eu un petit moment de stress quand je me suis aperçu que l’horaire réservé auprès du sanctuaire ne correspondait pas à celui affiché sur mon programme… il a fallu draguer un peu la sœur philippine et lui faire un joli sourire pour qu’on puisse célébrer. Ouf !
Samedi, journée à Nazareth. Nous devions commencer par un temps au grand air à Arbel en profitant du soleil mais la météo était à la pluie. Changement de programme donc avec Sepphoris, “parure de toute la Galilée”, mosaïques, théâtre, cardo…
Déjeuner à Nazareth. Visite de la ville : nous passons à l’église orthodoxe de Saint-Gabriel et nos choristes slavons chantent un motet à la Vierge Marie : « il est vraiment digne de te bénir ». Messe dans la basilique supérieure (dont la déco est décidemment mochissime). Le temps de sortir de Nazareth, il n’était plus temps de s’arrêter à Cana.
Dimanche, nous quittons la matinée pour aller à Césarée maritime. On attendait la pluie et nous avons eu du soleil. Visite passionnante qui permet d’évoquer Hérode, Ponce Pilate, Bérénice, saint Paul, Eusèbe et Origène, et saint Louis… Déjeuner sur le port puis départ vers Bethléem. La route est bonne et nous arrivons en avance. Bethléem est blindé de monde, ambiance métro de Tokyo. Messe sympa dans la grotte dite de saint Joseph. Nous devons renoncer à passer dans la grotte, plus de 500 personnes attendent et ne pourront pas toutes passer avant 18 h, horaire de fermeture. La queue commençait à l’entrée de la nef (la porte arménienne vient d’être restaurée) passait sous les colonnes du bas-côté nord, redescendait la nef jusqu’à la porte d’entrée et remontait entre les colonnes du bas-côté sud… Nous nous contentons donc des mosaïques croisées, fraîchement restaurées sur les murs de la nef. En ce moment, on dégage les mosaïques constantiniennes cachées à 75 cm sous le sol actuel. C’est magnifique !
Passage dans un magasin de souvenirs. Installation chez les Sœurs du Rosaire, à deux pas du Carmel de Bethléem, de l’École des Frères et du palais présidentiel palestinien. La sœur supérieure de la communauté s’appelle Sœur Émérentienne. Le soir, Denis est venu parler de son travail à l’hôpital de la Sainte-Famille tenu par l’Ordre de Malte et de la situation en Palestine. Les pèlerins ont apprécié son franc-parler.
Lundi matin, nous quittons Bethléem et le bus nous débarque au sommet du Mont des Oliviers. C’est une partie avec laquelle j’ai du mal, pas tant pour les lieux que l’on visite que de l’affluence toujours impressionnante. Passage presque obligé au Carmel du Pater, vue sur la Vieille Ville, Dominus Flevit, Gethsémani… Le bus nous récupère et nous laisse à Saint-Pierre-en-Gallicante. Nous regardons la maquette de Jérusalem à l’époque byzantine. Puis, repas chez les Sœurs Maronites, visite du Musée de l’Histoire de Jérusalem dans la Citadelle. Nous passons au Cénacle qui est presque vide et permet une petite visite priante avant la messe au couvent franciscain. Passage à la Dormition, nous avons de la chance, la crypte est réouverte après quelques travaux encore en cours la semaine précédente. Installation à la Casa Nova, maison d’accueil des franciscains au cœur de la Vieille Ville. Le soir, veillée adoration-confession-heure sainte…
Le groupe devant le Dôme du Rocher


Mardi, traversée du quartier juif de la Vieille Ville, prière au Mur occidental, montée sur l’esplanade des Mosquées, passage à Sainte-Anne où nous passons une heure. Trois d’entre nous, membres d’un chœur polyphonique de chants orthodoxes, chantent à nouveau le motet à la Vierge. Visite de l’Ecce Homo, ça y est je commence à me repérer… Pour mes pèlerins, je ne sais pas trop… Nous sommes bien en avance et l’on peut profiter de la terrasse pour se poser avant le déjeuner. Messe de la Passion dans la basilique de l’Ecce Homo. Nos choristes chantent un Tiebie Poiem du XIIIe siècle. J’en ai encore la chair de poule…
Puis chemin de croix dans les rues de Jérusalem suivant le tracé traditionnel du XIVe s. À la quatrième station, nous doublons les pèlerins de la Roche-sur-Yon, à la piété un peu longuette… Ce fut un beau moment accompagné par le texte du P. Marie-Eugène (publié dans Jésus, contemplation du mystère pascal). Par bonheur, nous pouvons traverser les chapelles éthiopiennes qui donnent accès la place devant la basilique de la Résurrection. Dans laquelle nous entrons, une fois le Chemin de croix achevé. Nous nous sommes directement placés dans la queue et je fais les explications pendant que nous attendons (merveille technologique des écouteurs). Tout s’est merveilleusement passé : ça défilait bien, nous avons été interrompu par la procession poméridienne des franciscains qui nous a inséré dans la vie liturgique de la basilique (on l’oublie trop souvent !) et tout le groupe est passé en cinq minutes et pour couronner le tout, l’orthodoxe qui dirigeait les opérations était sympa, souriant, cordial et il parlait anglais (c’est suffisamment rare pour le souligner : l’anglais et la cordialité).
Puis nous avons fait le tour de la basilique. Rapide passage à l’École biblique de Jérusalem. Le soir, vous vous en doutez, j’étais cané !
Mercredi matin, visite du Yad vaShem, mémorial de la Shoah. Nous voyons la vallée des communautés et le mémorial des enfants. Puis descente vers Ein Karem, lieu de la visitation. Nous célébrons la messe dans la petite église. Repas chez les Sœurs de Sion : un petit paradis au bout d’une ruelle paisible. L’après-midi, nous passons au Musée d’Israël : la fameuse maquette de Jérusalem et le sanctuaire du livre. Le reste de l’après-midi, shopping dans la Vieille Ville. Le soir, veillée partage : chacun évoque une émotion, un lieu ou une rencontre qui l’a touché pendant le pèlerinage. Nous délions les langues grâce à un peu d’arak palestinien. Ce fut très touchant. Pour les pèlerins, j’avais demandé des exemplaires de la revue Terre Sainte Magazine, pour leur donner envie de s’abonner.
Jeudi, départ à 8 heures pour Abu Gosh : rencontre avec le Fr. Olivier, puis messe de la Résurrection dans l’abbatiale (***). À la communion, nos chanteurs chantent un Gloire à Dieu slavon de toute beauté. Il faut un peu houspiller le groupe pour ne pas s’attarder à la boutique (« Laissez-en pour les suivants ! »), route vers l’aéroport où je laisse mes pèlerins à leurs formalités d’embarquement. Je reprends le train qui me laisse toujours pantois. J’ai fait une sieste mémorable… Puis je suis allé assister à la conférence donnée à l’École biblique : « Les fondements métallurgiques du yahwisme israélite », donné par Nissim Amzallag, un Franco-Israélien (d’origine française) biologiste de formation (il est imbattable sur les questions d’évolution des espèces) et professeur à l’Université de Beer Sheva, au département de Bible, Archéologie et Proche Orient ancien. Le titre aurait pu laisser penser à une sorte de “cadavre exquis” et en fait c’était passionnant. Vous trouverez un résumé de ses recherches. Dans quelques jours, ce sera mis en ligne sur la chaîne YouTube de l’ÉBAF.
Vendredi matin, soutenance de thèse de Nicola Agnoli, prêtre du diocèse de Vérone, sur le livre de Jérémie. C’était intéressant et cela m’a paru moins long que pour celle d’Henri Vallançon, il y a trois ans. L’après-midi, sieste et étude à la maison. Samedi matin, bibliothèque. L’après-midi, je suis allé chez Laurent et Laurence pour regarder le match de rugby France-Écosse. Après-midi sympa.
À bientôt,
Étienne+

dimanche 10 février 2019

Envoie donc à Jaffa (Ac 11,13)


ἀπόστειλον εἰς Ἰόππην
aposteilon eis Ioppèn

Chers amis,
Depuis une petite semaine, j’ai bien travaillé mais aussi préparé mon pélé paroissial. Ils arrivent mardi après-midi à 17 h. Semaine calme et sans péripétie particulière.
Samedi midi, je suis allé à la messe à l’ÉBAF. L’après-midi, bonne promenade dans Jérusalem : rue Hillel, cour suprême, boulevard Herzl, Sh’muel Bait, Bezalel Bazak, Rachel Imenu, ancienne gare… Sous une fine pluie, car c’est la tendance du moment. J’espère seulement qu’on va passer entre les gouttes avec les paroissiens.
Le soir, je suis allé dîner chez Jean et Agnès, un couple de la communauté de l’Emmanuel. Ils habitent dans la rue Ha Ayin-Heth, par laquelle je passais pour aller à l’École il y a trois ans (depuis j’ai trouvé un chemin plus direct et rapide qui longe la voie du tram ; par la rue Ha Ayin-Heth, il faut traverser deux grosses avenues et je pense qu’il a dû arriver que des gens meurent de faim en attendant que le feu des piétons passe au vert). On a bien discuté. Ils m’ont parlé d’un projet qu’ils viennent de mettre en place avec d’autres personnes : « Nostra Aetate 4 » pour encourager et connaissance et l’estime mutuelles entre les traditions juive et chrétienne. Le but de l’Association est d’initier le grand public chrétien à la richesse et la profondeur de la pensée juive – pour mieux connaître les sources de la foi chrétienne et mieux comprendre le judaïsme dans son authenticité. Si vous êtes intéressé, vous avez les infos sur le site https://na4.org.
Ce matin, je suis allé à la messe à Abu Gosh. Tramway puis bus. Sauf que je ne savais plus quel bus prendre pour aller à Abu Gosh. Le 189 arrive et annonce Qiryath Yearîm. Je monte dedans. Et de fait le bus me dépose dans ce village qui domine Abu Gosh, et il ne m’a plus fallu qu’un quart d’heure de marche pour arriver au monastère. Belle messe de la solennité de sainte Scholastique, sœur de saint Benoît. Encore une fois, je n’avais pas prémédité cela mais c’était très beau. Petit apéritif post-eucharistique.

À la sortie, Denis de Bethléem me propose d’aller prendre une pizza à Jérusalem, mais un concours de circonstances m’a fait avouer que je ne connaissais pas Jaffa. Alors va pour Jaffa ! Nous voilà dévalant les collines de Judée pour nous approcher du port. C’est caraque, crasseux et tout ce que vous voulez, mais ça a un charme fou… Et puis, un peu d’iode, un vent et des nuages de tempête. J’ai pris une assiette de fruits de mer (excellente !), un petit tour sur le port avec une belle lumière de fin d’après-midi et une mer qui tanguait bien. Et nous voilà repartis vers Jérusalem…
Le retour a été épique : des embouteillages partout ! Dans tous les sens… Cela nous a donné l’occasion de pas mal discuter…
17 h 30, j’étais à la maison… Un thé, quelques courriels de paroissiens en train de boucler leur valise… Et voilà…
À bientôt,
Étienne+


lundi 4 février 2019

Lumière pour éclairer les nations (Lc 2,32)

אוֹר לְהָאִיר לַגּוֹיִם
ͻôr lehāͻîr laggôyim
Chers amis,
Une fois n’est pas coutume, je mets un titre du Nouveau Testament en hébreu mais vous comprendrez pourquoi…
Journées en bibliothèque toutes semblables. Ce qui varie, c’est l’heure de passage des chats devant la fenêtre. J’ai appris ces jours-ci que la densité de chats à Jérusalem est une des plus fortes au monde : 2000/km² ! (soit plus de 100 000 dans toute la ville). De fait, ils sont bien utiles pour se débarrasser des rats (il arrive qu’on en voie dans la Vieille Ville)… Mais, depuis quelque temps, on a installé des bennes souterraines. Par conséquent, les chats manquent de nourriture. Donc, la mairie a affecté une allocation pour nourrir les chats… Bref, on ne chait plus à quel chaint che vouer !
Samedi, j’ai concélébré la messe à l’EBAF. Nous étions 20 prêtres et une fidèle !
L’après-midi, je suis allé me balader, j’ai fait un tour par la vallée du Cédron, puis je suis monté au Mont Scopus, près de l’Université. Depuis ce point-là, on voit le désert de Judée et ce jour-là, tout était très clair : je me suis amusé à repérer Kypros et le Wadi Qelt. Puis j’ai suivi une route que je ne connaissais pas et qui passe derrière l’Université. J’ai découvert l’entrée du jardin des plantes, fermé un jour de shabbat évidemment. J’ai aussi vu le cimetière britannique avec les morts de la Première Guerre mondiale dans cette région. Passage à côté de Giv’at haTaḥmoshet (colline des Munitions) puis j’arrive enfin au but de mon périple : le parc du Sanhédrin, dans le quartier de Sanhedriah. Dans ce parc, on a retrouvé des tombes de l’époque du ier s. de notre ère. Traditionnellement, on dit que ce sont les tombes des membres du Sanhédrin ; mais ce nom ne leur a été donné qu’au xve… Dans tout le jardin public, il y a des tombes, dans ce qui a dû être auparavant une carrière. Entre 1948 et 1967, quand il était impossible aux juifs d’aller au Mur occidental, ils allaient prier là.
Une des tombes du parc
J’ai pris quelques photos, mais pour cela, il a fallu que je déploie des ruses de sioux. En effet, le quartier de Sanhedria est un quartier haredi (= ultra-orthodoxe) où le respect strict du shabbat est de rigueur. Par exemple, des barrières empêchent les voitures d’y pénétrer. Ou encore les gens se chargent de vous dire qu’il ne faut pas utiliser d’appareil électrique. Et le parc est aménagé avec des jeux d’enfants et, un jour de shabbat, c’est à peu près la seule chose qu’on peut imaginer faire en famille quand on est ultra-orthodoxe : aller se promener au parc pour jouer au toboggan avec les enfants. Mais j’ai réussi à prendre mes photos en douce.
Après, j’ai exploré le parc. Je regardais les familles qui jouaient. Ce qui est frappant, c'est l'uniformité vestimentaire des gens : tous les hommes sont habillés de la même manière (encore que je pense qu'il y a des petits détails que nous ne voyons pas mais qui marquent les différences). Toutes les femmes portent la même perruque (modèle Drôles de Dames) et les mêmes robes moches. Malgré tout, on sent qu'il y a un effort sur le vêtement, justement parce que c'est shabbat. Chez nous, la tenue du dimanche, c'est souvent le vieux survet informe... Je me disais pourtant que si c’est une drôle de vie, que ces gens ont un vrai “dimanche”, où la famille vit véritablement ensemble, même si c’est à cause d’une énorme contrainte sociale et religieuse. En France, les gens ont des dimanches de fous entre accompagnements aux activités des gamins, activités diverses… Finalement, les gens vivent sous le même toit mais ne vivent pas ensemble... Et maintenant, on veut ouvrir les magasins, ce sera la fin de tout.
Puis vers 16 h 30, les gens ont commencé à plier bagage. Moi aussi, je suis rentré chez moi en suivant la rue Sh’muel haNavi (Prophète Samuel) qui longe le fameux quartier ultraorthodoxe de Mea Shéarim. La rue s’emplissait de monde, j’ai réalisé que les gens allaient vers le Mur occidental, pour prier au moment de la fin du shabbat. À un carrefour, il y avait une petite fille (5 ans à tout casser) mignonne comme un cœur qui hurlait « Shabbes » à toutes les voitures qui passaient… Je me suis dit qu’à cet âge, elle était déjà bien partie…
Le soir, j’ai mangé seul (les frères étaient à Bethléem)… Je me suis dit qu’une chandeleur sans crêpe, c’était pas valide. J’ai donc cherché les ingrédients pour faire des crêpes mais je n’ai pas trouvé la farine… (le lendemain, j’ai réalisé qu’elle était dans le frigo de la cuisine où je ne l’avais pas cherchée…) Peste ! Alors, je suis allé rue de Jaffa et j’ai trouvé un glacier-gaufres-crêpes… J’ai donc eu ma crêpe de la chandeleur. Ouf !
Bazar du YMCA à la Tour de David (≈1920-1940),
collection Matson (la photo est à l'envers...)
Dimanche, le matin, je suis allé visiter le musée de la Tour de David. Nous le visiterons avec les paroissiens de Saint-Didier et je voulais me le remettre en tête. Il y avait une exposition temporaire London in Jerusalem sur la vie des Anglais pendant la période du mandat britannique (1917-1948). Pendant 30 ans, les Anglais ont administré la région par mandat de la SDN. Cela a impliqué une présence assez forte et une administration conséquente ainsi que l’organisation d’une vie sociale très British : installations sportives, cinéma, musées, écoles, garden parties, ventes de charité par des dames patronnesses, églises… C’est à cette époque que le fameux hôtel King David et le YMCA ont été bâtis. 
L’après-midi, une petite balade et je suis allé célébrer la messe dominicale à la paroisse hébréophone. Pour moi, cela devait être seulement une messe du dimanche, mais pour la paroisse, c’était la fête patronale : elle est placée sous le patronage du vieillard Siméon et de la prophétesse Anne (cf. Lc 2,22-40) et nous avons donc fêté une autre fois la fête de la Présentation. Les gamins étaient montés sur des ressorts. J'ai pensé à ceux de Saint-Didier qui sont finalement presque sages comme des images.
Ce lundi, journée normale, sauf que j’ai célébré deux fois la messe : une fois le matin à l’Ecce Homo, comme cela sera le cas désormais tous les lundis ; et une fois le soir, pour les frères. Cela m’a donné l’occasion de célébrer deux fois la messe du bienheureux Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus !
À bientôt,
Étienne+